Projet de loi sur la fin de vie : des réactions controversées

Projet de loi sur la fin de vie : des réactions controversées

Ces dernières décennies, l’Union Européenne a vu plusieurs de ses pays membres pencher en faveur d’une autorisation à l’euthanasie. Parmi eux la Belgique, les Pays-Bas, le Luxembourg, l’Espagne ou encore le Portugal. Jusqu’alors, la France ne s’était pas prononcée sur de telles mesures, le pays restant profondément ancré dans une idéologie « d’encouragement à vivre ». Pourtant, le 10 mars dernier, le président s’est exprimé sur le sujet en annonçant le lancement d’un projet de loi pour une « aide à mourir ». 

Si le gouvernement s’était jusqu’à présent contenté de relancer un plan de renforcement d’accès aux soins palliatifs (soins accordés à des malades incurables pour atténuer leurs souffrances), c’est un tout autre projet que propose depuis peu Emmanuel Macron. Une « aide à mourir » encadrée selon des « conditions strictes », sur des patients aux profils spécifiques. Seulement, une personne atteinte d’une maladie incurable, avec un pronostic vital engagé, et dont les souffrances sont insoutenables et réfractaires, pourra choisir de mettre fin à sa vie, via l’utilisation d’une substance létale. Un projet de loi qui fait réagir certains soignants et religieux, qui alertent face à un texte qui ouvrirait « à la fois au suicide assisté et à l’euthanasie ».

Catherine Vautrin, ministre de la Santé et invitée sur France Inter le 12 mars dernier, avait répondu à ces propos en précisant à nouveau les conditions de la loi. [Interview à retrouver ici]. Elle a notamment insisté sur la notion de discernement : un élément clé du texte. Le patient doit à tout prix être en capacité de donner son consentement. Lui-même est à l’origine de la demande, et il doit, à plusieurs reprises, confirmer son intention. La loi s’appliquerait donc uniquement à des personnes dont l’état psychologique est stable. Pour donner un exemple, des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer,  ne pourraient ainsi pas en bénéficier, peu importe le taux de souffrance auquel ils font face. En cela, la loi diffère de l’euthanasie qui, on le rappelle, permet de donner la mort sous un avis médical, avec ou sans consentement du patient en question. Il en est de même concernant le suicide assisté, à travers lequel on donne la possibilité à un individu de déterminer la fin de sa vie. Ici, les conditions pour avoir accès à l’aide à mourir sont particulièrement strictes, et la décision d’administrer la substance légale, ou non, revient à un « collège de médecins » et infirmiers, chargés d’accepter ou de refuser la demande du patient. Il ne s’agit pas simplement de décider de sa mort dans n’importe quelles circonstances. A rappeler qu’une fois la demande acceptée, l’administration de la substance létale devra se faire, soit par le patient lui-même, soit s’il est dans l’incapacité de le faire physiquement, par une personne tierce (un médecin ou un proche), auquel il aura fait appel.

Cela fait des années que certains militaient en France pour un tel projet, en partant du principe qu’il était inacceptable pour des patients, en phase terminale de cancer par exemple, de devoir partir à l’étranger pour être accompagnés dans leur désir de mettre fin à leurs souffrances. Alors que la loi réjouit les fervents de cette aide active à mourir, il n’en est pas de même pour tous. Les soignants, l’Église ou encore la droite dénoncent le franchissement d’une limite dans l‘interdiction de tuer. Pour eux, la solution n’est pas d’aider les patients à mourir, mais de les aider à vivre, en mettant en avant plus de mesures pour garantir l’accès aux soins palliatifs. Si une grande partie des soignants s’opposent à ce projet de loi, c’est parce qu’ils s’appuient sur le serment d’Hippocrate (serment prêté par les médecins avant de commencer à exercer), au sein duquel on retrouve la phrase : « Je ne provoquerai jamais la mort délibérément ». Pour eux, accepter de participer à la mort d’un patient, ce serait faillir à leur devoir et à leurs promesses. La loi française devrait cependant permettre aux soignants qui ne veulent pas y participer, d’invoquer une clause de conscience. Enfin, si d’autres citoyens sont opposés à la loi, c’est par peur de dérivations extrêmes, comme en Belgique où l’euthanasie est également autorisée pour les mineurs.

A souligner qu’il reste encore bon nombre d’étapes à franchir avant la mise en place de ce projet de loi qui sera présenté, d’abord au Conseil des ministres au mois d’avril, puis à l’Assemblée nationale en mai. Affaire à suivre.

 

Crédits photo : stux – Pixabay

Share

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *