Polémique : Transfert des orques de Marineland vers le Japon

Polémique : Transfert des orques de Marineland vers le Japon

Un exercice d’entraînement à des manipulations de cétacés a eu lieu le mardi 9 janvier 2024, à l’abri des regards, dans le parc Marineland d’Antibes. Cet exercice nécessitant une importante logistique annonce-t-il un départ imminent des trois orques ? Des associations pour la cause animale sont mobilisées pour éclairer cette affaire et faire intervenir la justice s’il le faut. 

Le mardi 9 janvier 2024, alors que le célèbre zoo aquarium du Sud de la France ferme ses portes au grand public comme chaque début d’année, de nombreux personnels ont été observés, s’affairant autour du bassin destiné aux orques du parc. Ce regroupement de personnes, menant de drôles de manipulations, dissimulées grossièrement par de grandes palissades, a interpellé le grand public, en particulier les associations de protection animale qui soupçonnent un futur transfert. 

L’association One Voice a dévoilé des photos et vidéos du dispositif. Nous avons pu constater les trois orques dans un bassin sous rempli, entourées d’une vingtaine de soigneurs, l’installation d’une grue télescopique et de harnais, plusieurs camions stationnés à l’extérieur de l’enceinte ainsi qu’une présence policière.

Selon One Voice, le parc voudrait se séparer de ses trois orques pour les vendre à des delphinariums japonais, où leurs conditions de vie pourraient être pires qu’en France. Ce sont les aquariums de Nagoya et de Kamogawa qui auraient acheté les animaux pour 6 millions de dollars.

 

Marineland d’Antibes

Marineland d’Antibes est le seul parc français à détenir des orques. Il ouvre ses portes sur la Côte d’Azur en 1970 et accueille environ 850 000 visiteurs annuels sur ses 26 hectares de propriété. Il s’agit du plus grand zoo marin d’Europe.

 

Inouk, Wikie et Keijo 

Cela fait 53 ans que le parc accueille des orques. Depuis 1970, quatorze sont passées par le parc. Aujourd’hui c’est le sort de trois d’entre elles qui préoccupe l’opinion publique : Wikie, son fils Keijo et son frère Inouk. Si les premières orques du parc ont été capturées dans leur milieu naturel, ce n’est pas le cas de Wikie, Keijo et Inouk qui sont détenues captives depuis leur naissance.

A l’origine elles étaient quatre, mais en octobre dernier, l’une d’elles, Moana, est décédée soudainement à l’âge de 12 ans, ce qui est très jeune pour un animal de cette espèce. Une orque est censée vivre 60 ans dans l’océan. Cet évènement a alarmé d’autant plus les associations et militants qui n’ont pas hésité à aller manifester pour appeler les autorités à offrir un meilleur avenir aux trois orques restants. 

 

Une rumeur démentie ?

Si dans un communiqué publié le 5 janvier, la préfecture des Alpes-Maritimes dément « la rumeur » selon laquelle les orques « seraient prochainement transportées au Japon ». Elle soutient également que « Les services de l’État n’ont reçu aucune demande de permis d’exportation et de certificat sanitaire, indispensables à tout transport des animaux vers l’étranger ». Il s’agirait seulement d’un exercice pour apprendre aux orques à se familiariser avec la manœuvre dans « l’hypothèse d’un déplacement ».

Mais l’association One Voice insiste en affirmant que « S’il y a « entraînement », c’est parce qu’elles vont partir » et met en évidence le coût élevé de ce genre de manipulation qui n’aurait pas lieu d’être sans raison. Sur le site Internet du parc, les orques n’apparaissent plus et les boutiques ne proposent plus de peluches à leur effigie. Tout porte à croire qu’un transfert est proche. 

 

« Un exercice d’entraînement »

Après un long silence, le samedi 13 janvier, le parc Marineland décide finalement de faire part dans un communiqué qu’un « exercice d’entraînement » s’est bel et bien déroulé avec les orques pour les préparer à un éventuel déplacement dans un nouveau lieu d’hébergement. Il nie cependant une quelconque vente des trois cétacés.

 

Intervention de One Voice

One Voice est une association, son slogan « Pour une éthique animale et planétaire » annonce ses combats. Fondée en 1995 par Muriel Arnal, One Voice prône entre autres l’interdiction de l’exploitation des animaux captifs pour le divertissement dans les delphinariums. 

Le 21 septembre 2023, la cour d’appel d’Aix en Provence soumet une expertise indépendante afin de vérifier les conditions de vie des orques du parc Marineland. Elle concerne l’examen de l’état de santé des animaux ainsi que de leurs bassins. C’est une première victoire pour l’ONG, qui suspectait déjà un mauvais traitement des cétacés et qui avait déposé plainte à plusieurs reprises. Le 19 janvier 2024, la justice a décidé que les orques devaient rester à Marineland au moins quatre mois, avant la remise du rapport d’expertise définitif.

 

Comment se déroule un transfert ?

Mais comment des animaux de cette taille, qui plus est marins, pourraient-ils être transférés aussi loin ? Il s’agirait d’un « voyage dangereux », source de stress pour l’épaulard, selon l’association « C’est Assez ! ». La première étape est de déplacer l’animal dans un camion à l’aide d’une grue. Ce camion amène l’animal à l’aéroport, qui est ensuite transporté dans un avion-cargo. Tout le long du vol, l’animal est sous tranquillisant pour éviter qu’il ait un comportement agressif dans un espace aussi confiné et est accompagné de plusieurs soigneurs pour veiller au bon déroulement du transfert.

 

Les raisons d’un transfert 

Pourquoi les associations redoutent-elles le transfert des trois orques malgré plusieurs démenties ? En France, la loi du 30 novembre 2021 qui vise à lutter contre la maltraitance animale, prévoit l’interdiction d’ici décembre 2026 de la détention et la reproduction en captivité des cétacés. Cette mesure, considérée comme une avancée en matière de respect de l’animal, pourrait être à l’origine de ce transfert. Comme le parc ne pourrait plus utiliser ses orques pour ses spectacles, il n’en n’aurait plus l’utilité et cela représenterait un coût important. 

Mais pourquoi ne pas prioriser un transfert vers un sanctuaire ? Il s’agit d’une réserve marine reproduisant l’habitat naturel des cétacés qui pourraient y vivre de façon permanente. La raison ? Financière. Si le parc n’a pour l’instant rien confirmé, cela lui coûterait plus cher de transférer les orques vers la Nouvelle-Écosse, à l’Est du Canada, que de les vendre au Japon. Sans compter le délai d’attente pour obtenir les autorisations afin de déplacer un animal de cette espèce dans un sanctuaire aussi reculé. 

 

Julia GAILLARD 

Crédits photo : Efraimstochter

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