Outre-Mer : le manque d’eau atteint son paroxysme

Outre-Mer : le manque d’eau atteint son paroxysme

Depuis des années, les territoires ultramarins, notamment Mayotte et la Guadeloupe, voient leur robinet résonner plutôt vides. Entre coupures permanentes et/ou provisoires, ces territoires d’Outre-Mer sont privés d’un élixir vital qui chamboule leur quotidien. 

 

Une situation alarmante aux facteurs divers

Les problèmes d’eau dans les territoires d’outre-mer français varient en fonction de l’emplacement spécifique et des circonstances. Certains territoires d’outre-mer ont des ressources en eau adéquates, tandis que d’autres rencontrent des problèmes d’approvisionnement en eau depuis de nombreuses années. Les problèmes d’eau peuvent être liés à la sécheresse, à la pollution de l’eau, à l’augmentation de la demande en eau due à la croissance de la population ou au développement économique, ainsi qu’à d’autres facteurs environnementaux et sociaux.

Il est important de noter que les problèmes liés à l’eau dans les territoires d’outre-mer peuvent être complexes et multifactoriels, et leur durée et leur gravité peuvent varier d’une région à l’autre.

À Mayotte, 30% de la population vit sans eau courante et selon le Conseil économique, social et environnemental, « un quart de la population de la Guadeloupe n’a pas accès tous les jours à l’eau, en raison de nombreuses coupures »

 

Mayotte : l’eau toujours aussi rare dans les robinets

Le département est confronté à une pénurie d’eau sans nom. Les habitants mahorais voient l’eau couler uniquement 1 jour sur 3. Le manque d’eau peut s’expliquer par la croissance d’une énorme sécheresse et le manque de pluie. Des restrictions pour le moins handicapantes apparaissent. Entre tours d’eau, coupures temporaires de distribution d’eau… Les habitants ne savent plus quoi faire et essayent de survivre comme ils le peuvent. Ils pointent du doigt la défaillance des infrastructures ainsi que le manque d’investissements.

Afin de s’en sortir comme ils le peuvent, lorsqu’ils ont de l’eau sur une plage horaire spécifique, ils n’hésitent pas à faire le plein de réserves (bassines et bouteilles). Malheureusement, lorsque l’eau coule, elle est impropre à la consommation, elle a une couleur plutôt marron, et la qualité de l’eau a des conséquences sanitaires. Des habitants se sont déjà plaints de maux de ventre à la suite de la consommation de celle-ci.

 

Un réseau d’eau dysfonctionnel en Guadeloupe

Le réseau d’eau en Guadeloupe connaît un dysfonctionnement continu depuis des décennies. Des habitants se voient privés d’eau ou alimentés par un liquide trouble et impropre à la consommation. Un réseau vétuste, un manque d’entretien, une multiplicité d’opérateurs et un déséquilibre financier ont sinistré le réseau de manière durable.

Celle qu’on appelle « L’île aux belles eaux » possède un réseau d’eau assez dégradé. Cette situation peut s’expliquer par un manque d’entretien et la difficulté financière des gestionnaires du réseau.

Rongé par les fuites sur 90% des branchements du réseau, un gaspillage assez conséquent de l’eau est observé. Hugues Delannay, directeur adjoint de l’Office de l’eau de Guadeloupe, déclarait : « La majorité des poses et des canalisations n’étaient pas conformes à l’époque (…) Nous vivons sur un territoire à risque sismique, où il y a beaucoup de mouvements de sol, et où les matériaux alors utilisés, l’amiante ou la fonte grise, cassants, n’étaient pas adéquats ».

L’assainissement constitue un autre facteur lié au manquement de l’eau. On recense plus de 65% de stations de traitement non-conformes sur le territoire. Si une station d’épuration peut en moyenne fonctionner jusqu’à trente ou quarante ans, leur durée de vie, en Guadeloupe, atteint à peine treize ans. Et lorsqu’une pompe casse, des années peuvent s’écouler avant que celle-ci ne soit changée. En Guadeloupe, 60% des foyers ne sont pas raccordés à une station d’épuration. Ils s’organisent alors autour de réseaux d’assainissement privés, dits « non-collectifs », qui, dans leur énorme majorité, ne sont pas aux normes.

Tous ces facteurs ont des conséquences très complexes pour les habitants qui se retrouvent sans eau dans les robinets pendant plusieurs jours dans certaines communes. Tandis que d’autres se retrouvent avec un liquide impropre à la consommation.

La défaillance de la distribution de l’eau impacte aussi considérablement l’accès à l’éducation. Entre impossibilité de nettoyer les locaux et l’inaccessibilité des sanitaires, les écoles doivent fermer quand les robinets ne coulent pas.

 

L’ONU et les députés somment la France d’agir

Dans un rapport publié le 2 juin 2023, le Comité des droits de l’enfant de l’ONU (l’Organisation des Nations Unies) alerte sur les problèmes d’accès à l’eau en Outre-Mer, et plus particulièrement à Mayotte et en Guadeloupe. Le comité déplore notamment « l’accès limité à de l’eau propre à la consommation » dans ces territoires.

Dans son courrier, l’instance soumet des recommandations à la France tout en pointant du doigt des lacunes à corriger. Il est demandé de « fournir aux enfants de l’Hexagone et des Outre-mer, en particulier pour les enfants de Mayotte et de manière très urgente pour la population guadeloupéenne, de l’eau potable » en attendant « la réparation des systèmes d’approvisionnement et d’évacuation des eaux ».

Ce n’est pourtant pas la première fois que l’ONU alerte la France sur les défaillances liées à l’eau pour ses territoires ultramarins. Le 1er mai 2023, le Conseil des droits de l’homme a interpellé la France sur la question du droit à l’eau, notamment en Outre-mer. Le gouvernement français, face à cette situation, ne semble pas vouloir agir et fait la sourde oreille.

Les députés ultramarins prennent aussi la parole afin d’alerter sur la situation. La députée LIOT (Libertés, Indépendants, Outre-Mer et Territoires) de la 1re circonscription de Mayotte, Estelle Youssouffa, déclarait : « cela fait 20 ans que le gouvernement promet des investissements et ne tient pas ses promesses ». Tandis qu’Olivier Serva lançait dans l’hémicycle de l’Assemblée Nationale le 10 octobre dernier : « Sé dlo a kaka nou ka bwè an Gwadloup jòd-la » (« En Guadeloupe aujourd’hui, on boit du caca. ») à l’intention du ministre délégué chargé des outre-mer, Philippe Vigier. Le député LIOT guadeloupéen pointait du doigt l’approvisionnement et la qualité de l’eau sur l’île des Antilles, qui restent compliqués et problématiques.

 

Crédits photo : rawpixels

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