Des pays du Maghreb à ceux du Moyen-Orient, l’orientalisme définit un mouvement artistique qui représente la fascination des Occidentaux pour ces derniers. D’Eugène de la Croix en passant par Victor Hugo, de nombreux artistes connus ont succombé à ce mouvement artistique du XIXe siècle. Retour sur une fascination pas si innocente que cela.
L’exotisme
Les thèmes abordés par les œuvres d’art appartenant au mouvement de l’orientalisme sont variés, un des plus récurrent étant celui du harem. Le mythe du harem fascine la société occidentale. En France, notamment, la traduction du livre Les Mille et une Nuits contribue à renforcer cette dernière. De nombreux tableaux s’en inspirent pour dépeindre des femmes aux cheveux voilés mais au corps dénudé. L’Orient est dépeint comme un lieu exotique, mystérieux, bien souvent avec une touche d’érotisme, entre songe et réalité, qui inspire les artistes en tout genre, qu’ils y aient déjà mis les pieds ou non.
XIXe siècle et Empire colonial
La montée de l’orientalisme va avec celle des colonies dans le Nord de l’Afrique, notamment de l’Algérie dont le paysage et les habitants furent le sujet de nombreux tableaux et écrits. La colonisation du Maghreb permet aux artistes de s’y rendre plus facilement et donc de pouvoir assouvir leur besoin d’inspiration et ainsi offrir à leur public des tableaux montrant des paysages désertiques ou encore des oasis. De nombreux artistes sont en quête de renouveau pour leur art et cette montée de l’orientalisme leur permet d’atteindre leur but et d’élargir leur horizon artistique.
De l’art, mais pas que
Derrière ces œuvres se cache un danger que le pionnier du post-colonialisme, Edward Said, s’est efforcé de démontrer. Ecrivain américano-palestinien, il définit l’orientalisme comme une étude savante mais pleine de clichés de l’Orient, une manière de polariser le monde en montrant qu’il y avait une société dominante et enfin, une façon de manipuler l’Orient pour servir le colonialisme. L’orientalisme est donc selon lui une arme qui permet aux Occidentaux d’instrumentaliser l’Orient en perpétuant des stéréotypes, façonnant l’idée que les pays du Moyen et Proche Orient sont un mélange de sensualité et de barbarie. Durant le XIXe siècle, les tableaux représentant des femmes blanches dénudées choquent l’opinion publique tandis que ceux représentant les arabes sont perçus comme hypnotisants. On peut y voir ici la genèse de la fétichisation des femmes maghrébines qui encore aujourd’hui sont souvent caractérisées comme mystérieuses ou désirables.
L’orientalisme est donc un mouvement artistique mais aussi une manière pour l’Occident de propager et normaliser ses idées et stéréotypes à propos de l’Orient.
Et aujourd’hui ?
Notre société actuelle est toujours grandement influencée par la vision stéréotypée de l’Orient. On retrouve encore souvent cette impression de mystère et d’érotisme autour du Maghreb et du Moyen-Orient comme sur les défilés Savage Fenty, marque de lingerie de Rihanna. C’est également présent dans les films et dessin animés comme Aladdin chez Disney avec les paroles de la chanson Nuits d’Arabiequi dépeignent celles-ci comme étant envoûtantes et au «insomnie d’amour/ plus chaude à minuit/ qu’au soleil, en plein jour ». Dans de nombreuses séries, les femmes voilées sont l’objet de désir d’un homme blanc pour qui elles finissent par retirer leur voile, apparaissant ainsi à ses yeux et celui des spectateurs, comme totalement désirable.
Si l’orientalisme est en apparence qu’un simple mouvement artistique, il aura contribué à perpétuer des stéréotypes sur les communautés du Maghreb et du Moyen-Orient dont elles souffrent encore aujourd’hui.
