États-Unis : La science dans le viseur de Donald Trump

États-Unis : La science dans le viseur de Donald Trump

Licenciement de milliers de scientifiques et d’experts, coupes brutales de financement dans le domaine de la recherche…  Les États-Unis qui ont toujours su attirer de nombreux chercheurs dans tous les domaines pourraient voir leur influence scientifique faiblir. Les décisions prises par Donald Trump se font au détriment de la planète et du secteur de la recherche.

Le vendredi 8 mars, “Stand up for science”,  un mouvement lancé par de jeunes scientifiques américains s’est fait entendre dans des dizaines de villes aux États-Unis.

Des milliers de personnes se sont rassemblées dans les rues pour s’opposer aux nouvelles coupes budgétaires et aux licenciements de masse visant les fonctionnaires, opération menée par le nouvel organisme d’Elon Musk, le “service d’efficacité gouvernementale” (DOGE).

Le même jour, plusieurs français ont tenu à montrer leur soutien. A Paris, devant la Sorbonne, plus d’un millier de scientifiques se sont rassemblés.

Olivier Berné, astrophysicien, Patrick Lemaire, biologiste, et Emmanuelle Perez Tisserant, historienne, ont cosigné une tribune dans le monde intitulé “défendre les sciences face aux nouveaux obscurantismes”.

Les chercheurs en état d’alerte

Les conséquences sont radicales : des dizaines de milliers d’emplois ont été supprimés ou sont en cours de suppression. De nombreux sites institutionnels sont fermés et l’accès à certaines bases de données est bloqué.

Le président a ordonné la réduction des effectifs de plusieurs agences fondamentales du gouvernement. Parmi elles : l’agence américaine de protection de l’environnement, l’USAID et la NASA.

L’agence spatiale des États-Unis est en effet particulièrement touchée par la vague de licenciements. Après avoir supprimé un programme de la NASA destiné à la surveillance de la Terre, c’est à présent au tour de la scientifique en chef, Katherine Calvin, de devoir quitter son poste.

Les chercheurs de l’agence spatiale américaine avaient d’ailleurs été exclus volontairement de la dernière réunion du GIEC.

 

Le domaine de la santé n’est pas épargné, puisque 1200 postes ont été supprimés à l’institut national de santé, mettant en danger d’importantes études sur le cancer, les maladies infectieuses…

Comme si ces mesures n’étaient pas suffisantes, Donald Trump n’a pas hésité à publier une liste de termes à présent interdits à l’utilisation dans les recherches et documents de travail : le CDC, centre de contrôle pour les préventions des maladies, a été contraint de retirer certaines publications contenant des mots tels que “genre” ou encore “LGBT”.

Un impact mondial

A travers cette prise de décision radicale, le leader américain n’affecte pas seulement son pays mais le reste du monde. La recherche est source de collaborations internationales, le partage des données est la base du progrès scientifique.

Cela implique alors des répercussions sur les programmes internationaux de collecte et d’interprétation de données pour l’avenir de la planète et la compréhension de l’univers.

En France, l’Académie des sciences a affirmé que “la censure exercée aujourd’hui va réduire la liberté de recherche dans les secteurs les plus porteurs”, tout en ajoutant que les dégâts engendrés par  les attaques du président américain ne pourront être réparés rapidement.

De nombreux chercheurs français et européens travaillant aux États-Unis tentent de revenir en France, à l‘institut Curie. Certains scientifiques américains font eux aussi partie du voyage.

“On essaye de les accueillir, mais évidemment on a nos propres contraintes et on ne peut pas tous les accueillir”, a déclaré le président du directoire de l’institut, en ajoutant : “ il va falloir une politique nationale et européenne”.

En attendant, plusieurs chercheurs américains essaient tant bien que mal de préserver les sujets de recherche qui dérangent le gouvernement en les archivant dans le but de les restituer une fois la tempête Trump passée.

L’économie avant l’écologie

Cette décision n’a d’autre but que de prioriser la production d’énergies fossiles et délaisser la lutte contre le changement climatique et pour la protection de l’environnement. Chris Wright, secrétaire américain à l’énergie, a évoqué la promotion du gaz naturel liquéfié, le GNL, et l’abandon de certaines normes. Il s’est d’ailleurs moqué de la présidence de Joe Biden, qui avait fait du combat contre le réchauffement climatique un enjeu important de son mandat.

On le sait, les États-Unis ont un rôle central à jouer par rapport à la transition écologique, le pays étant le deuxième émetteur mondial de gaz à effets de serre.

Sous la présidence de Joe Biden, Washington s’était engagé dans le cadre de l’accord de Paris à réduire ses émissions de moitié d’ici 2030 par rapport à 2005, et à atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050. Cette perspective, déjà difficilement imaginable, se voit maintenant largement menacée par la politique de Donald Trump. Dès son retour au pouvoir, il avait fait part de sa volonté de retirer les États-Unis du traité international.

Les mesures prises s’avèrent bien plus dévastatrices par rapport au premier mandat du président américain. Entre 2017 et 2021, ce dernier avait déjà mis en place quelques censures ponctuelles, ordonné la suppression de certaines données… Mais il avait surtout exercé une pression sur les chercheurs, les contraignant dans leurs travaux. Il s’agissait dans la plupart des cas de la suppression d’informations sur le changement climatique.

A présent, le dirigeant américain ne fait plus les choses à moitié : les disciplines touchées sont multiples et les conséquences d’autant plus graves.

En clair, Donald Trump souhaite avoir le contrôle de la production scientifique et de la connaissance, et ce n’est pas tout : le ministère de l’Éducation s’attire aussi les foudres du président…

Nina CLAUDE-COUPIAC

 

Crédits photos : GENE M. MARCHAND/ENTREPRISE

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