Équateur : la guerre des gangs se poursuit en prison

Équateur : la guerre des gangs se poursuit en prison

Le plus grand centre de détention d’Équateur à Guayaquil connait depuis plusieurs mois une escalade de la violence. Lors du dernier affrontement en date, le 12 novembre dernier, ces règlements de compte, liés pour la plupart au trafic de drogue, ont fait 68 morts et 25 blessés. Fin septembre, la prison de Guayaquil avait déjà été le théâtre d’un terrible affrontement.

 

Guerre des gangs interminable

Malheureusement, l’Amérique Latine est connue pour la violence des gangs qui règnent en maîtres dans ces pays, et l’Équateur n’y réchappe pas… En effet, depuis de nombreuses années maintenant, des bandes criminelles appelées « Maras » terrorisent les habitants et obtiennent, grâce à la violence et la corruption un pouvoir politique énorme. Chaque gang possède un terrain où il sème la terreur, et la plupart des règlements de comptes qui ont lieu sont dus soit à une guerre de territoire soit au trafic de drogue.

Ces rixes entre bandes rivales sont une véritable gangrène pour le pays, puisque la violence de ces criminels n’a pas de limite et se poursuit maintenant dans les prisons où ils sont tous parqués. Cette tension croissante dans le milieu carcéral a récemment explosé, puisque déjà fin septembre, dans la même prison de Guayaquil, un premier massacre avait fait 119 morts. Les derniers affrontements en date « sont le résultat d’une dispute territoriale entre bandes criminelles à l’intérieur de la prison », selon la police locale. Corps mutilés et brûlés, les scènes du 12 novembre étaient d’une grande sauvagerie. Les gangs responsables de ces affrontements sont connus dans le pays, il s’agit des « Tiguerones », « Lobos » et « Latin King ». Ces trois groupes dominent une grande partie du narcotrafic Équatorien.

Récit d’un bain de sang

Vendredi 12 novembre, la nuit commence à tomber dans la prison de Guayaquil ; les 8 500 détenus rejoignent chacun leur cellule. Tout à coup, l’établissement pénitentiaire se retrouve sans lumière : l’électricité semble avoir été sabotée. Soudain, des premiers coups de feu retentissent à l’intérieur du bloc 2, puis s’en suivent des détonations. Des assaillants tentent d’assiéger et de coincer les détenus du bloc 2. Le chef de ce bloc, connu comme le leader des « Tiguerones », a été libéré quelques jours auparavant après n’avoir purgé que 60% de sa peine. Les 700 prisonniers de ce bloc cellulaire étant donc sans leader. D’autres blocs, avec d’autres gangs ont essayé d’y entrer et d’y perpétrer un massacre total. Un affrontement terrible s’annonce et durera tout au long de la nuit.

Samedi matin, les émeutes se poursuivent, une grande tension règne à l’intérieur et à l’extérieur de la prison. Le cadavre d’un détenu gît sur le toit du bâtiment, aux murs maculés de glaçantes traces de sang. Des détenus dans la cour de la prison continuent de s’affronter à coups de bâtons et d’armes blanches au milieu de corps entassés, pour la plupart en train de se consumer dans les flammes. Comme en septembre, la cruauté est le maître-mot de cette terrible soirée du 12 novembre, au cours de laquelle certains détenus seront retrouvés démembrés, décapités ou brûlés.

Il faudra attendre la mi-journée, et l’intervention de 900 policiers, dont 500 à l’intérieur du complexe pénitencier pour que la situation soit sous contrôle. Le bilan de cette soirée dramatique, est de 68 morts et au moins 25 blessés.

Une fois une certaine accalmie retrouvée à l’intérieur de la prison, de nombreuses familles de détenus pour la plupart paniquées et en pleurs se sont rassemblées autour du centre pénitencier. « Aidez-nous » suppliaient ces parents désespérés. « Ce sont des êtres humains, aidez-les », pouvait-on lire sur une banderole. Depuis le début de l’année, les émeutes dans les prisons équatoriennes ont fait plus de 308 morts, et endeuillé des centaines de familles.

 

Affrontements et nouvelle polémique

Suite à ces évènements tragiques, le président équatorien s’est exprimé, et a vivement critiqué la haute instance juridique, en appuyant sur le fait que ce nouveau bain de sang était un « signal d’alarme pour les institutions de l’État équatorien, en particulier la Cour constitutionnelle ». Une des grandes faiblesses des prisons équatoriennes, est la surpopulation. Les 65 prisons peuvent accueillir 30 000 personnes, mais sont occupées par 39 000 détenus, soit une surpopulation d’environ 30%.

Dans la prison de Guayaquil, qui abrite 8 500 criminels, la limite est dépassée d’environ 60%. La violence n’a jamais cessé dans ce pénitencier divisé en douze quartiers, où sont parqués les membres d’au moins sept organisations criminelles ayant des liens avec les cartels mexicains comme Sinaloa et Jalisco Nueva Generación. Des armes de toutes sortes, de la drogue et des téléphones portables y circulent en grand nombre, facilitant les règlements de comptes.

Guayaquil, ville portuaire et centre économique d’Équateur, connaît ces dernières années une forte hausse de la criminalité. Située entre la Colombie et le Pérou, principaux producteurs mondiaux de cocaïne, la ville est utilisée comme principale zone de transit pour l’expédition de drogues vers les États-Unis et l’Europe.

Les autorités locales font tout leur possible pour contrer la violence des « Maras », mais entre violence, corruption et toute puissance des cartels, il semblerait que ce soit déjà trop tard.

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