À jamais les premières 

À jamais les premières 

Vingt ans, quasiment jour pour jour, après le premier sacre mondial de l’équipe de France de handball et du sport collectif féminin, en 2003, les bleues ont remporté, ce dimanche 17 décembre à Herning (Danemark), un troisième titre de championne du monde. La bande à Estelle Nze Minko, la capitaine, s’est défaite de son adversaire le plus coriace, la Norvège, sur le score de 31 à 28. Pour fêter les vingt ans de ce sacre, nous vous proposons de revivre une victoire historique. Assurément, l’une des finales les plus mythiques du sport français. 

 

Effectifs :

France Hongrie 

Gardiennes : Valérie Nicolas (16) Katalin Pálinger (16) Joanne Dudziak (1) Irina Sirina (1)

Joueuses de champ : Isabelle Cendier (2) Bernadett Ferling (2) Estelle Vogein (3) Beata Bohus (3) Leila Lejeune (4) Ilboya Mahlmann (4) Sandrine Delerce (5) Erika Kirsner (6)

Mélinda Jacques-Szabo (6) Bojana Radulovics (9) Nodjialem Myaro (7) Krisztina Pigniczki (10) Véronique Pecqueux-Rolland (8) Agnes Karkas (11) Sophie Herbrecht (10) Anita Görbicz (13) Stéphanie Cano (11) Eszter Siti (15) Isabelle Wendling (13) Timea Toth (17) Myriam Borg-Korfanty (14) Zsuzsanna Lovász (18) Raphaëlle Tervel (20) Anita Kulcsár (19)

 

« Le match de sport co le plus incroyable » 

Ces mots sont ceux de celui qui vient d’ajouter une nouvelle ligne à son immense palmarès, en tant que sélectionneur de l’équipe nationale. En effet, Olivier Krumbholz, est déjà à la tête des Bleues lors du mondial 2003 disputé en Croatie. Un tournoi abordé avec l’étiquette de sérieux outsider après avoir décroché la médaille d’argent, quatre ans plus tôt, lors du dernier mondial. À l’époque, ils leur manquent encore cette victoire dans une compétition internationale pour prétendre au statut de favori n°1. Les Françaises, portées par leur gardienne Valérie Nicolas, élue meilleure joueuse du tournoi, rejoignent la finale après un parcours quasi sans faute (8 victoires en 9 rencontres). Elles affrontent, à Zagreb, la redoutable équipe de Hongrie, championne d’Europe en 2000.

La France entame la rencontre sans se poser de questions et prend rapidement deux buts d’avance (3-1), grâce à l’ailière gauche Raphaëlle Tervel. Des questions, elles s’en poseront beaucoup trop ensuite. La Hongrie, portée par un public totalement acquis à sa cause (10 000 Hongrois ont fait le déplacement), sort le bulldozer et tente de terrasser une équipe de France qui peine à se lâcher. Elles collent un 7-0 aux Françaises pour prendre l’avantage : 8-3. Les joueuses d’Olivier Krumbholz butent sur l’écœurante Katalin Pálinger pendant treize minutes, une éternité au handball. La gardienne tutoie la perfection en cette première période, qu’elle finira avec seulement huit buts encaissés pour onze arrêts. À titre de comparaison, hier soir, les françaises avaient déjà fait trembler les filets à vingt reprises, au moment de regagner les vestiaires. Mais, cette équipe de France version 2003 a des ressources, elle n’abdique pas et à la pause elle est revenue à seulement trois unités (11-8 pour la Hongrie).

Malheureusement, le début de seconde période ressemble à celui de la première. Emmenées par la meilleure joueuse de l’année 2000, Bojana Radulovics (13 buts sur la rencontre), les Magyars (surnom de l’équipe de Hongrie) prennent le large pour compter sept longueurs d’avance à sept minutes du terme. Le sélectionneur français s’avoue même vaincu : « je n’y crois plus » à ce moment-là. Pour compliquer la tâche des tricolores, la pivot titulaire et pilier de la défense, Isabelle Wendling, se fait expulser. Le rôle de capitaine prend alors tout son sens lorsque Stéphanie Cano décide de hausser le ton défensivement, en exerçant un pressing agressif sur les attaquantes hongroises. Sans le savoir elle vient d’allumer la mèche, il n’y a plus rien à perdre et les Françaises se lancent à corps perdu dans la bataille. Survoltée par sa capitaine, Myriam Borg-Korfanty réalise, coup sur coup, deux interceptions et conclue deux actions bleues. Cinq buts de retard et le chrono continue de tourner. Cette équipe « sans star » (Sandrine Delerce, demi-centre) réagit collectivement et instaure le doute dans la tête de leur adversaire. Les chevaux sont lâchés, à une minute et quinze secondes du terme, elles sont revenues à deux unités. Le miracle devient envisageable. Les Françaises s’offrent une balle de prolongation à trente secondes du coup de sifflet final. La possession est en faveur des Hongroises. Côté bleu, l’équation est simple, il faut intercepter et marquer rapidement. La prophétie se réalise. Le ballon est arraché aux mains de l’adversaire et la contre-attaque est emmenée par la jeune Sophie Herbrecht. Elle tente de transmettre à Véronique Pecqueux-Rolland, sur l’aile gauche, depuis sa moitié de terrain. La « passe arrive miraculeusement dans ses mains » après avoir été déviée reconnaît la passeuse. « Véro » entame une percée en solitaire dans le mur hongrois et provoque un penalty sur le gong, qui entraîne aussi l’exclusion de la défenseure magyare. La lourde responsabilité est prise par Leila Lejeune. En première mi-temps, Pálinger avait pourtant stoppé sa tentative au jet de sept mètres. Mais, avec une confiance retrouvée, la Française décide de tirer au même endroit et propulse la balle au fond des filets, 28 partout, fin du temps réglementaire.

Les hongroises, annoncées victorieuses quelques minutes auparavant, voient la foudre s’abattre sur eux en prolongation. Valérie Nicolas (gardienne) choisit ce moment clé pour se réveiller après un match en dehors de ses standards du début de compétition. Elle réalise six parades dont un penalty et la France creuse l’écart dès la première minute. Cette équipe « renversante », comme le titre L’Équipe au lendemain de la victoire, ne lâche plus la tête et décroche le premier titre mondial de son histoire par trois buts d’écart, comme en 2023 (32-29). « Un truc de fou » résume Olivier Krumbholz.

 

Un sacre fondateur 

Il fallait au moins ça pour inaugurer le palmarès doré des françaises. Ce modèle de combativité et de résilience ne pouvait donner naissance à autre chose qu’une génération exceptionnelle de handballeuses. Toujours coaché par, le légendaire, Olivier Krumbholz, à la tête de l’équipe depuis 1998 (il effectuera une courte pause entre 2013 et 2016), les tricolores règnent aujourd’hui en maître sur la planète handball. Aucun titre ne leur échappe désormais : championnes du monde en 2017 et 2023, championnes d’Europe en 2018 et le Graal olympique en 2021 à Tokyo. De bon augure pour Paris 2024 ?

 

Hippolyte Lefebvre

Crédits photo : querpass_bilder – Flickr

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