2 mois et demi après avoir éclaboussé la France de son talent aux Jeux Olympiques où il a remporté quatre médailles d’or, le “roi Léon” était de retour à la compétition pour la coupe du monde de natation. Vainqueur final de la compétition, il en a profité pour pulvériser tous les records à sa portée et continuer à asseoir son hégémonie. Sa supériorité sur ses adversaires fait incontestablement de lui, l’un des meilleurs nageurs du monde, mais comment fait-il ?
Léon Marchand, le chasseur de records
A à peine 22 ans, le Toulousain a presque tout gagné : quadruple champion olympique, champion du monde, champion de France ou encore champion NCAA (association sportive universitaire aux Etats-Unis). Son palmarès impressionnant lui a déjà permis d’être adoubé par les plus grandes légendes de la natation comme Michael Phelps, mais il ne se contente pas seulement de gagner ses courses haut la main, il pulvérise aussi des records. Sa tournée asiatique en Asie dans le cadre de la coupe du monde a été pour le champion olympique un franc succès. En pleine reprise après ses six semaines de repos bien méritées, il a explosé le record du monde du 200m 4 nages en petit bassin de Ryan Lochte (record qui date de 2012) en 1 minute 48. La veille, c’était le record d’Europe du 100m 4 nages qui est tombé à son tour (49’92). Au final, après trois semaines de compétition en Chine, en Corée du Sud et à Singapour, le néo champion du monde est rentré en France avec dans ses bagages huit nouveaux records (cinq records de France, deux records d’Europe et un record du monde).
Couronné meilleur nageur à l’issue de la tournée, le quadruple champion olympique continue de prouver qu’il n’est pas n’importe qui. Il nous l’avait déjà prouvé cet été quand il s’est aligné pour un doublé historique sur la finale du 200 m papillon et du 200 m brasse. Et même s’il devait encore prendre ses repères en petit bassin et reprendre son rythme après six semaines de coupures, Léon Marchand continue de tout casser et de faire lever les foules. Le Directeur Technique National de la fédération de natation est même dithyrambique à propos de la jeune pépite. “C’est le meilleur athlète de la planète, on a de la chance qu’il soit français. C’est exceptionnel d’avoir un mec comme ça”. Comment ne pas être d’accord avec ces propos quand un soir d’été 2024, celui qu’on appelle déjà le GOAT rendait fou la foule de la Défense Arena après avoir réalisé un quadruplé historique, lui ouvrant les portes d’un cercle fermé de sportifs ayant déjà réalisé cet exploit.
Des capacités hors normes
Alors alien ou surdoué de la natation ? Léon a comme tous les grands sportifs une arme secrète, qui le rend unique. Il n’est pas rare de voir des nageurs professionnels avec une technique de nage singulière, mais ce qui fait de Léon Marchand un crack, c’est ce qu’on appelle dans le langage de la natation, les coulées. La coulée est un terme qui désigne la phase où le nageur est complètement sous l’eau après un départ ou un virage et où le nageur ne nage pas. C’est une technique primordiale que tous les nageurs professionnels doivent maîtriser à la perfection car elle permet de gagner de précieuses secondes lors d’une course. En effet, la résistance sous l’eau est beaucoup moins forte qu’en surface.
Mais pour éviter la triche, une limitation de quinze mètres a été fixée. Dans un podcast accordé à France Info à l’occasion des Jeux Olympiques, Jérémy Stravius, champion olympique en relais 4×100 m nage libre à Londres, explique que “si on ne limitait pas justement à ces quinze mètres, quasiment tous les nageurs passeraient leur temps sous l’eau”. Ce qui semble logique car sinon les nageurs profiteraient de cet avantage d’aller plus vite dans l’eau et la course perdrait tout son sens. Cette maîtrise des coulées permet donc à Léon Marchand de grappiller le plus de secondes possible quitte à flirter avec la limite des quinze mètres. C’est grâce à ses coulées qu’il a réussi à battre le record du monde de Michael Phelps sur 400 m 4 nages aux Championnats du monde de Fukuoka en 2023. Impressionnant par sa technique de nage, il est souvent comparé à un poisson à qui il manquerait les écailles ou même à un dauphin, ce qui a fait fleurir beaucoup de memes et de théories humoristiques sur X.
Mais en plus de sa technique sur les coulées, la pépite profite également de son physique avantageux. Amandine Aftalion, mathématicienne et chercheuse au CNRS, s’est penchée sur le phénomène. “Sa morphologie, grand, plutôt filiforme – musclé mais pas trop – est parfaitement adaptée. Elle lui permet d’être hydrodynamique, c’est-à-dire de limiter les vagues”. Selon elle, sa souplesse qui lui permet de se propulser dans l’eau lorsqu’il ondule et sa technique de nage parfaite, en fait un nageur complet. Sa morphologie parfaite – qui à ses débuts était un vrai complexe – lui permet de nager sans effort et de fendre l’eau à la vitesse de l’éclair, d’où les chronos incroyables. Même Bob Bowman, le célèbre entraîneur de Marchand qui a coaché la légende Michael Phelps, n’hésite pas à abuser des superlatifs pour parler de son protégé. « Il est le meilleur nageur de l’histoire avec ses coulées. Je n’ai jamais vu quelqu’un réussir des ondulations comme les siennes, même Michael. Michael y mettait beaucoup de puissance alors que Léon a une morphologie parfaite, on dirait une torpille. Il n’a pas de hanche.« .
Un règne qui ne fait que commencer
“Pour moi, ce n’est pas terminé, c’est le début. Je suis très excité (par l’avenir). Mon prochain objectif est Los Angeles 2028”. C’est par ces mots que Léon Marchand avait conclu sa semaine olympique complètement folle. En d’autres termes, celui qu’on surnomme le Michael Phelps français, n’est pas rassasié. Constamment comparé à la légende américaine, le Français rêve d’égaler son aîné et déborde d’ambitions. Même s’il est sûr de ses forces, il cherche toujours à s’améliorer, en même temps il n’a que 22 ans. Il reste cependant bien conscient qu’il a encore une marge de progression avant de devenir “The Greatest” (le plus grand en français) de la natation. L’une de ses ambitions était par exemple de s’améliorer au 200 m nage libre. Avec déjà quatre courses de prédilection, Léon Marchand est un nageur presque complet mais son entraîneur est bien conscient que faire du 200 m nage libre, la cinquième, signifie avant tout relever encore le niveau. Rien qui puisse effrayer le natif de Toulouse à priori.
Et s’il n’a pas froid aux yeux, Léon Marchand ne peut pas s’empêcher de repousser ses limites à l’extrême. Son ambition la plus chère ? Égaler Michael Phelps et ses huit médailles d’or remportées en une seule édition des Jeux Olympiques, les Jeux de Pékin en 2008. Michael Phelps avait remporté cinq médailles d’or en individuel et trois médailles d’or en relais. Ce record n’a jamais pu être égalé à ce jour, mais Léon Marchand n’est pas n’importe qui. Il est d’ailleurs même plus rapide que l’américain sur les trois disciplines en commun (200m, 400m 4 nages et 200 m papillon) qu’avait dominé Phelps en Chine et Marchand en France (Kristóf Milák garde encore des souvenirs amers du papillon).
Mais, il ne faut pas oublier que Michael Phelps a également été porté par une équipe américaine impressionnante lors du relais, ce qui leur a permis de glaner ces trois breloques d’or. Si Léon Marchand est un monstre en individuel, l’équipe de France en relais est encore un peu trop courte pour égaler la “Team USA”, malgré de très belles promesses pour la natation française. Mais la team France a encore quatre ans devant elle pour s’améliorer et porter Léon Marchand sur la première marche du podium pour les Jeux Olympiques de Los Angeles. La première étape aura d’ailleurs lieu à Budapest pour les championnats du monde en petit bassin, avec en tête de file Vous-Savez-Qui. Une occasion pour les français de montrer de quel bois ils se chauffent et pour Léon Marchand, d’écrire un peu plus l’histoire même si pour le quadruple médaillé olympique, Florent Manaudou, “Il a de grandes chances de devenir le plus grand nageur français de tous les temps”.
Il voulait être roi, mais il l’est déjà. On pourrait penser que Léon Marchand n’a plus rien à prouver à personne à part peut-être à lui-même. Sa tournée asiatique parle pour elle-même, les records du monde qu’il collecte comme des Pokémons eux aussi : il veut rentrer dans l’histoire de la natation française et dans l’histoire de la natation tout court. Nul doute en tout cas, que ses performances passées et futures continueront à faire briller la natation française dans le monde.
Léa Patrocinio
Crédits photos : AP Pic ; X – @EuroAquatics
Étudiante en histoire, passionnée de lecture, de culture et de sport, de nature curieuse et toujours à l’affût de l’actualité, je rêve de devenir journaliste.
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