Précédemment dans l’Instant Mytho :
Cronos, maître de l’Univers, connaissait enfin le bonheur auprès de Rhéa, sa sœur, et tenait dans ses bras sa fille Hestia, nouvellement née. Cet enfant se révélerait-il être une source de joie pour le roi Titan ou bien l’instrument de sa destruction ?
Après un temps de réflexion, Cronos approcha ses lèvres du front de son bébé… Sans doute pour y déposer un baiser paternel ? Perdu ! Sa bouche s’ouvrit et il goba tout rond la petite Hestia. Rhéa entra dans une colère noire mais se laissa finalement convaincre par son mari qui lui assura qu’il ne mangerait jamais plus un seul de leurs enfants. Quand sa femme donna à nouveau naissance à un être en tout point semblable à feu-Hestia, il ne put tenir sa promesse. Il engloutit Déméter, sa seconde fille, et jura à nouveau qu’il ne recommencerait plus. Rebelote : Cronos trouva en sa troisième fille, Héra, un autre repas divin, bien que cette fois, il ne s’épuisa pas à donner des explications à sa femme. Celle-ci espérait qu’après plusieurs enfants avalés, Cronos serait repu à jamais. Le quatrième enfant se trouva être un garçon, Hadès, qui suivit le funeste destin de ses sœurs au fin fond du ventre de Cronos, puis vint le deuxième fils, Poséidon, qui ne fit pas exception à la règle.
Rhéa désespérait d’un jour voir cette boucle sans fin se briser. Enceinte de son sixième rejeton, elle trouva en sa mère, Gaïa, une précieuse conseillère. Cette dernière lui souffla un plan qui permettrait au futur bébé d’échapper à l’appétit gargantuesque de son père. Sans hésitation, Rhéa s’offrit un séjour jusqu’en Crète, au mont Ida, où elle fit une halte. Il y existait une grotte peuplée de nymphes et de satyres.
Les nymphes sont des divinités mineures prenant l’apparence de belles jeunes femmes, souvent associées à la nature, tandis que les satyres forment une race hybride d’hommes aux sabots de bouc en guise de pieds. Ils ont tendance à poursuivre lesdites nymphes pour faire des actes qui de nos jours se verraient tweeter avec le Hashtag « MeToo ».
Rhéa demanda asile aux habitants de la grotte et choisit ce moment pour donner naissance à son dernier fils : Zeus (eh oui, vous l’attendiez tous depuis le début de cette chronique, il est enfin là !). Rhéa venait d’accomplir une partie de sa mission : éloigner son fils des dents de Cronos. Les nymphes faisaient de parfaites baby-sitters, donnant du lait de chèvre au petit pendant que les satyres lui chantaient des chansons. Rhéa demanda aux Courètes, des dieux-soldats crétois, de frapper leurs boucliers de leurs lances pour exécuter la Pyrrhique (sorte d’ancêtre de la capoeira, mêlant danse et combat) pour cacher les cris de bébé Zeus à Cronos. Tout avait été clairement pensé et Rhéa voyait enfin une lueur d’espoir dans ce monde… Mais une ombre venait ternir ce tableau : si le roi des Titans voyait Rhéa revenir sans enfant à lui présenter, il ratisserait le monde entier pour le retrouver. Sur le chemin, la Titanide ramassa un gros caillou et l’enveloppa dans une couverture, imitant la forme d’un nouveau né (oui, il faut avoir un peu d’imagination là). Rhéa présenta alors la pierre emballée comme son fils à Cronos qui, on a l’habitude maintenant, l’avala sans réfléchir. Il trouva que ce dernier bébé était un peu plus dur à digérer que les précédents mais ne remarqua pas la supercherie de sa femme.
« Il suffit mon cher époux, je ne te donnerai plus de descendants ! acheva-t-elle en tournant les talons.
– Il était grand temps, femme ! Mon estomac commençait à se faire trop petit ! ».
Les années passèrent et le petit Zeus devint grand, beau et fort. La vie était paisible pour lui, entouré des nymphes et des satyres… Mais un jour, Rhéa retourna auprès de son fils avec la requête suivante : libérer ses autres frères et sœurs de leur prison intestinale. Zeus n’était pas vraiment enthousiaste à l’idée de quitter sa vie tranquille pour se lancer à bras-le-corps dans une mission de sauvetage périlleuse, mais il finit par céder aux demandes de sa mère (l’idée de prendre la place de Cronos en tant que roi de l’Univers l’avait peut être aidé à faire son choix).
C’est ainsi que Zeus quitta son cocon en Crète pour rejoindre le palais de son infâme glouton de père. Mais comment le jeune dieu s’y prendra-t-il pour libérer ses frères et sœurs d’une très probable digestion titanesque?
Vous le saurez en lisant le prochain article de l’Instant Mytho !
Article de Margaux Pradeau
Dessin du satyre de Justine Dehaese
Contact : margaux.pradeau@laposte.net • Twitter: @Margaux_Prada