Handicap infantile en France, une situation compliquée

En France, 3 enfants sur 1000 (sunrisemedical) naissent avec un handicap moteur. Souvent, les familles optent pour des soins ailleurs qu’en France. Coûts, prise en charge, qu’est-ce qui amène ces parents à choisir l’étranger ? Quelles difficultés peuvent traverser ces familles au quotidien ?
À travers un échange avec Corinne, mère de Kilian, né avec une infirmité motrice cérébrale l’empêchant de marcher, nous essayons d’en savoir un peu plus.


Les Rêves de Kilian

Kilian, aujourd’hui 12 ans, est né avec un handicap moteur dû à un manque d’oxygène à la naissance. Enfant comme les autres, il ne peut cependant pas marcher. 

Face au manque de soins proposés en France, ses parents se sont tournés vers l’étranger. Ainsi, depuis 2013, Kilian suit la thérapie Biofeed Back aux États-Unis afin d’identifier les cellules motrices non fonctionnelles pour faire travailler l’enfant dessus. En plus de ces soins, il suit aussi des thérapies intensives en Espagne par session de trois semaines, constituées de séances de kinésithérapie, d’ostéopathie ou encore de piscine. Jusque-là incapable de se déplacer autrement qu’en rampant, il peut aujourd’hui marcher avec de l’aide

Cependant, comme tout enfant à cet âge, il grandit. Et cette croissance entraîne une déformation osseuse car l’os grandit mais pas ses tendons, entraînant alors douleurs et, avec le temps, une incapacité à marcher. Face à cela, une opération est envisageable : une rhizotomie dorsale sélective, consistant à ouvrir une vertèbre afin de couper les nerfs communicants mal avec le cerveau. Selon les médecins, cette opération permettrait, au minimum, à Kilian de pouvoir marcher seul en autonomie en intérieur et seulement aidé d’une canne à l’extérieur. Seulement, cette opération, prévue pour l’été 2021, toujours aux États-Unis, présente un coût nettement supérieur aux thérapies actuelles pour la famille : 75000 €.

Ainsi, l’association « Le Rêve de Kilian », créée en 2012 par sa famille, a beaucoup aidé jusque-là. Par le biais d’animations ou d’événements, ils ont pu récolter des fonds afin de financer les soins de Kilian ou encore les besoins matériels qu’il requiert (fauteuil roulant, déambulateur…). Mais avec la crise sanitaire actuelle, il est plus difficile, voire impossible d’organiser des animations et donc plus compliqué de financer l’opération. 

C’est pourquoi une école de Saint-Vincent de Tyrosse participe à diverses actions pour aider l’association.

 

Une école en soutien à l’association

Depuis la rentrée scolaire 2020, les classes de Béatrice Ory (CE2-CM1) et Fanny Soulas (CM1-CM2) de l’école Sainte-Marie (40) se sont engagées dans plusieurs actions de solidarité pour l’association « Le Rêve de Kilian ». Ainsi, les deux classes se sont lancées dans la fabrication de bateaux en origami pour le départ du Vendée Globe, action qui a permis de récolter près de 700 €, et aujourd’hui, dans un défi de course à pieds.

L’objectif de ce défi ? Courir 100 kilomètres et les comptabiliser sur une application dédiée avant le 28 février. L’application propose alors de choisir une enseigne, et celle qui récoltera le plus de « 100 kilomètres » pourra faire un don de 5000 € à l’association de son choix. Ainsi, « Le rêve de Kilian » est parrainé par l’enseigne Running Bordeaux et depuis la rentrée des vacances de février, les enfants du CE2 au CM2 courent tous les jours pour accomplir ce défi, allant d’un kilomètre à parfois plus : « certains ont parcouru sept kilomètres hier », en plus d’une bonne action, c’est un véritable challenge pour les enfants.
Les deux enseignants nous confient que les élèves se sont prêtés au jeu, si bien qu’en seulement quelques jours, plus de 280 kilomètres ont déjà été parcourus.

Alors est-ce que d’autres écoles se sont jointes à cet élan solidaire ? Visiblement non, « c’est bien dommage que d’autres établissements n’aient pas fait la même chose car c’est très fédérateur », « même pas son propre collège », déclarent les enseignantes. En tout cas, l’école Sainte-Marie aura bien contribué au défi.

 

Une prise en charge à revoir en France

Bien que la France possède un assez bon système de santé, lorsqu’il est question de handicap, tout devient plus compliqué, à commencer par les soins. 

En effet, la mère de Kilian nous explique que les soins proposés dans le pays se limitent à des soins palliatifs et quelques séances de kinésithérapie, loin d’être suffisantes pour que l’enfant puisse espérer marcher et gagner en autonomie. De plus, les enfants handicapés représentent un fardeau pour les kinésithérapeutes, qui préfèrent recevoir plusieurs clients en même temps, plutôt que de se consacrer à un seul enfant handicapé.

Face à cela, deux solutions : se limiter à ce qui est proposé et pris en charge en France ou opter pour des soins plus importants mais aussi plus coûteux à l’étranger. Pour la famille de Kilian, pas de doutes, tout doit être fait pour aider le garçon. Ainsi commencent les allers-retours réguliers aux États-Unis et en Espagne, plusieurs fois par an. Bien-sûr, ces soins, associés aux coûts d’un tel voyage pour une famille de quatre, se montrent rapidement très onéreux. 

Réalité bien connue, aux États-Unis, les dépenses de santé sont très importantes. Ainsi, Corinne nous explique que chaque voyage sur le continent Américain leur coûte 10 000 €, ceci deux fois par an, tandis que pour l’Espagne, le prix revient à presque 9000 €, une fois par an, le tout sans aucune prise en charge ou aide du système français. 

À cela s’ajoutent les frais de matériels, qui eux aussi, sont très mal pris en charge. En effet, Corinne nous explique qu’un déambulateur adulte coûte 52€, dont 50€ remboursés, tandis que pour un enfant, les coûts grimpent à plus de 600€ alors que la base de remboursement reste la même.

 

A l’école, une bienveillance pas toujours de mise

Et pourtant, les soins ne constituent pas les seuls obstacles qu’ont pu traverser la famille. En plus des pépins administratifs, l’école s’est aussi montrée une véritable épreuve

Kilian et son frère, tous les deux scolarisés dans une école de Tarnos (40), ont vécu un « véritable calvaire », nous confie leur mère. Kilian, alors en classe de CP, a passé l’année seul aux récréations, pas aidé lorsqu’il en avait besoin. Des problèmes auxquels l’enseignante répondait par des propos outrageants tels que « Je ne vais pas empêcher les autres gamins de courir parce que le vôtre ne peut pas », alors que la mère de Kilian demandait seulement à ce qu’un camarade puisse jouer avec son fils aux billes.

À cela s’ajoutent aussi les sorties à la piscine, tout à fait accessibles au garçon à condition de porter des brassards, où l’enseignante déclare « j’avais oublié qu’il était handicapé » en voulant lui faire porter une ceinture flottante à la place. 

En bref, tous les jours un nouveau problème se posait, « Kilian était malheureux », nous dit sa mère. 

L’année suivante, les deux garçons changent d’école et arrivent à Saint-Vincent de Tyrosse (40). Vu le passif scolaire, l’accès à l’école semblait aussi compliqué. En effet, d’après l’enseignante de son ancienne école, Kilian n’avait pas sa place dans le système scolaire ordinaire, et le placer dans un centre pour handicapés serait préférable.

Pourtant la directrice de l’école n’en fait pas cas et souhaite découvrir par elle-même ce garçon qui semble poser problème, et le constat est bien l’opposé de ce que le dossier pouvait dire. Kilian a ainsi fini sa primaire dans l’école, aidé par la bienveillance de chaque professeur ainsi qu’une assistance de vie scolaire avec qui « il formait un super duo », et est entré au collège Jean-Claude Sescousse. Aujourd’hui, c’est un collégien épanoui, bien entouré d’amis, de professeurs et de sa famille, dont la scolarité se déroule à merveille

 

Même si les sorties en famille sont limitées par les coûts des thérapies, la famille fait tout de même beaucoup d’activités ensemble : ski, balade, sortie à vélo – tricycle pour Kilian, ou encore la Dune du Pila l’été dernier, dont Kilian était très fier. « Toujours la banane, Kilian nous apporte que du bonheur ».

 

Aujourd’hui, les appels aux dons pour financer l’opération de l’été prochain continuent mais il manque encore plus de 28 000€ à la famille. Si vous souhaitez participer à l’opération, vous pouvez faire un don sur la page Facebook de l’association : 

https://www.facebook.com/permalink.php?story_fbid=3282081655238393&id=2047895018657069

 

Célia Ory

Crédits photos : page Facebook “Le Rêve de Kilian”

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