« Enfant très peu utilisé cherche parents pour réadoption » : les petites annonces américaines

 

Crédit photo: Economie Matin

Si le verbe « réadopter » n’existe pas dans notre langue, c’est pourtant une pratique très courante chez nos voisins américains. Elle consiste à adopter un enfant, puis à publier une petite annonce afin de l’abandonner à une autre famille en toute légalité. Les causes de ce « rehoming » sont multiples : trouble du comportement de l’enfant, changement de situation familiale, sentiment d’être dépassé… Alors comment les américains ont fait des enfants un véritable marché?

25 000 enfants abandonnés par leur famille adoptive chaque année, voilà l’envers du décors du « pays de tous les possibles ». Comme en France pour demander des conseils sur comment déboucher son évier, on trouve des forums  de discussion pour les parents qui ont ou vont abandonner leurs enfants. On peut y lire sur les mots de certaines mères rongées par le remord à l’idée de se séparer de ces enfants. L’une d’elle se justifie ainsi: « Je n’arrive pas à m’attacher à eux ». Oui oui, elle ne parle pas de Bobby et Sam, les deux poissons rouges de la famille mais bien de deux enfants de 5 et 6 ans qu’elle a adopté à leurs naissances. La réponse de son mari? « C’est notre croix à porter». Le site adoption.com regorge de témoignages comme celui-ci.

Une envie soudaine? Commandez votre enfant! 

Le « rehoming » reste malgré tout une pratique très organisée. De nombreuses agences américaines sont spécialisées dans les petites annonces de ces « enfants d’occasion ». C’est le cas de Wasatch International Adoptions, une agence privée situé dans l’Utah, avec son programme « Second Chance ». Sur ce site, nous sommes confrontés à un catalogue d’enfants; des photos accompagnées d’une fiche descriptive de chacun: « blond, aidant, doué à l’école…». De véritables petites annonces type leboncoin où les futurs parents peuvent choisir les caractéristiques de leur futur enfant, de la même façon que l’on choisit un micro-onde. La valeur marchande de l’enfant se situe là où un enfant « neuf » coûte moitié moins cher qu’un enfant d’occasion: 5 000€ contre 3 500€ pour un enfant qui a déjà été adopté.

Wasatch International Adoption

Mais toutes les familles ne font pas appel à ces agences et proposent leur enfant à l’adoption de façon autonome sur le net. Pourtant, dans certains Etats, le passage devant un tribunal est obligatoire pour réadopter un enfant. Face à ce  marché parallèle dénué de tout contrôle, le Wiscosin a décidé de voter une loi en avril 2014 interdisant aux parents de faire de la publicité d’enfants de plus d’un an et de les proposer à l’adoption sans passer par une personne spécialisée. Cette loi vaut aujourd’hui dans dix Etats; les quarante restants n’ont toujours pris aucune mesure et ferment les yeux sur ce trafic.

La Fashion Week américaine: Défiler pour être adopté

France 5, dans son documentaire « Etats-Unis, enfants jetables », paru en 2016, présente le visage noir de l’Amérique. Le reportage s’ouvre sur un défilé d’enfants organisé par une association de réadoption. Timides, conscients de l’enjeu, les enfants s’élancent un à un sur le tapis rouge entouré de parents potentiels venus admirer le spectacle. On déclame leurs caractéristiques au micro, comme lors d’une vente aux enchères. A l’issue du défilé, les parents peuvent consulter le catalogue des enfants et remplir une fiche s’ils ont eut un coup de cœur.

Liberation / Sylvie Serpix

Face au journaliste présent sur place, une femme venue adopter décrit l’événement comme « une grande foire commerciale où les produits à vendre sont des enfants ». Des propos déconcertants, des pratiques accablantes…Peut-on vraiment descendre plus bas dans l’échelle de l’humanité? Jusqu’où l’Homme ira-t-il pour faire du profit? Quand est-ce que les Etats-Unis cesseront de considérer les enfants comme de simples marchandises? Des questions qui restent encore aujourd’hui sans réponses face à la cruauté dont sont victimes ces enfants de l’autre côté de l’Océan…

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