Des grands axes de circulation bloqués, une enseigne McDonald’s vandalisée avec une botte de foin, des radars bâchés et des panneaux de signalisation renversés. Vous n’avez certainement pas pu passer à côté. Actuellement, l’une des plus grandes révoltes agricoles connues à ce jour se déroule dans l’hexagone. Retour sur les causes principales ayant conduit à une mobilisation aussi massive des agriculteurs français.
Il est important de comprendre que les agriculteurs constituent une catégorie très vaste, englobant un large éventail de professions et de problématiques liées à ces métiers. Cependant, trois sujets spécifiques émergent au sein de cette mobilisation. Le premier point unificateur de cette colère concerne les inégalités de revenus. Pour prendre conscience de cette disparité, il est essentiel de comprendre qu’un agriculteur ne gagne pas autant en fonction de ce qu’il cultive ou élève. Prenons l’exemple d’un éleveur ovin et caprin (éleveur de chèvres ou de moutons) qui, selon l’Agreste en 2022, aurait un revenu moyen six fois inférieur à celui d’un éleveur porcin. Cette inégalité de revenus est également illustrée par les chiffres de l’Insee. En effet, en 2021, la classe socio-professionnelle présentant le taux de pauvreté le plus élevé est celle des agriculteurs, avec 17,4%. Si l’on considère l’ensemble de cette étude, on se rend alors compte que les agriculteurs sont deux fois plus susceptibles de se retrouver en situation de pauvreté que l’ensemble de la population. Alors que la situation semble déjà assez complexe, s’ajoute une augmentation des coûts de production, notamment due à l’inflation à laquelle la France est confrontée, mais aussi à une nouvelle taxe sur le gazole non-routier.
Le second point fédérateur de cette colère est la répercussion sur la santé physique et mentale auxquels font faces les agriculteurs. Lorsque vous avez de faibles revenus et des conditions de travail difficile (on parle ici d’une durée hebdomadaire de travail en moyenne de 53,6 heures), il est facilement compréhensible que la santé se détériore rapidement. Cela est visible d’un point de vue psychologique lorsque l’on sait qu’un agriculteur se suicide tous les deux jours selon une étude de Santé Publique France parue en 2017. D’un point de vue physique, il est aussi important de prendre en compte l’utilisation des pesticides, développant des maladies mortelles sur le long terme pour les agriculteurs.
Le troisième et dernier point ayant conduit à cette révolte est le problème de la concurrence face aux produits importés de l’étranger. Lorsque l’on se rend dans nos grandes surfaces pour acheter des tomates, on réalise rapidement que les produits les moins chers proviennent souvent du Maroc, car les méthodes et les coûts de production y sont bien moins élevés. En ce qui concerne l’importation de volaille, les éleveurs français doivent faire face à la concurrence ukrainienne. En effet, depuis juin 2022, l’Union européenne, dans une perspective de soutien à l’Ukraine dans la guerre, a levé les droits de douane sur les importations. Néanmoins, l’Ukraine ne faisant pas partie de l’Union européenne, elle n’est pas soumise à des normes de production aussi exigeantes que celles des pays membres. Par conséquent, ces produits importés se retrouvent vendus à des prix beaucoup plus bas, créant ainsi une concurrence déloyale envers les producteurs français.
Face à ces multiples problèmes et à une colère grandissante, un mouvement s’est lancé à l’automne 2023. Initiée par la FNSEA (Fédération Nationale des Syndicats d’Exploitants Agricoles) et les Jeunes Agriculteurs, l’opération appelée «OnMarcheSurLaTête» a pris de l’ampleur sur l’ensemble du territoire. Se manifestant initialement par des panneaux de sortie de commune renversés, le mouvement s’est renforcé au fil du temps, conduisant à la mise en place d’opérations de blocage d’autoroute sur la A64 et la RN20. Par ailleurs, cette mobilisation ne concerne pas uniquement la France. En tant que problème commun lié aux normes européennes, nous avons pu observer 5 000 tracteurs bloquer le centre de Berlin mi-janvier, tandis qu’un mouvement prenait de l’ampleur en Pologne, en Roumanie et aux Pays-Bas.
Les médias ont également joué un rôle crucial dans cette mobilisation, que ce soit sur X (anciennement Twitter), d’où est né le mouvement de base, et où l’on trouve une actualité débordante sur le sujet, mais aussi à travers la télévision, la radio et la presse écrite, qui rapportent à chaque heure l’évolution des manifestations.
Du côté du gouvernement, le tout fraîchement nommé Premier ministre, Gabriel Attal, s’est rendu à la rencontre des agriculteurs dans le Rhône. Dans une optique d’apaiser les tensions, le Premier ministre a annoncé que les amendes infligées à l’industrie de la grande distribution ne respectant pas les lois Egalim seront réaffectées afin de soutenir les agriculteurs. De plus, il a déclaré que des aides liées à la politique agricole commune seront versées sur les comptes bancaires des exploitants le 15 mars. De son côté, le ministre de l’Agriculture, Marc Fresneau, qui était censé présenter un projet de loi sur l’agriculture, a repoussé le projet de quelques semaines pour y apporter des modifications allant probablement dans le sens des revendications.
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