Chantage à fausse sextape, manipulation bancaire ou encore escroquerie, voici ce dont la Chine est de plus en plus victime face au développement de l’intelligence artificielle. Pour un gouvernement qui dépend de sa capacité à contrôler les informations mises à la disposition de ses citoyens, l’hypertrucage représente une menace existentielle.
L’hypertrucage (aussi connu sous le nom de deepfake) correspond à la vidéo d’une personne, dont le visage où le corps a été modifié numériquement grâce à une intelligence artificielle afin qu’elle apparaisse comme quelqu’un d’autre. Cette pratique est généralement utilisée à des fins malveillantes ou pour diffuser de fausses informations.
Des arnaques toujours mieux ficelées
En avril dernier, un escroc a réussi à convaincre un homme d’affaires de lui transférer 570,000 euros. Il a pour cela utilisé l’intelligence artificielle pour prendre les traits et la voix d’un proche de la victime. Ce dernier ne s’étant pas méfié, il effectua le virement de 4,3 millions de yuans depuis le compte bancaire de son entreprise. Il décida par la suite d’envoyer un message à l’ami dont l’identité avait été usurpée. Mais c’est devant la réaction d’incompréhension de son ami – qui n’était évidemment pas au courant de la transaction – que l’homme d’affaires a compris son erreur et a contacté la police. Elle a directement prévenu la banque de ne pas effectuer le virement et la victime a pu récupérer son argent in extremis. L’histoire de Guo (nom de famille de la victime) est malheureusement loin d’être rare. C’est à se demander si les règles de sécurité de l’information sont encore adaptées face à ces nouvelles techniques d’escroqueries.
Des enjeux politiques
Dans une société où tout est enregistré, des caméras de surveillance à la reconnaissance faciale sur smartphone, les données relatives aux visages où à la voix des individus s’achètent aisément sur Internet. Connue pour sa “police d’Internet” ou encore son “grand pare-feu” qui examinent avec soin ce qu’il se passe sur Internet, la Chine est mise à mal dans cette guerre contre l’hypertrucage. La stabilité du Parti communiste ou encore la sécurité des intérêts nationaux sont directement touchées par ces technologies sophistiquées. Selon Emmie Hine du Groupe de gouvernance numérique : “Un seul faux post peut être censuré ou officiellement discrédité. Cependant, une hypothétique fausse théorie du complot soutenue par des photographies, des vidéos et des documents truqués numériquement ne peut pas être contrée aussi facilement.” Le régime souhaite empêcher toute contestation, notamment virtuelle, par un contrôle total d’Internet.
Une régulation plus que nécessaire
Le 10 janvier 2023, la Chine met en place une réglementation visant à encadrer l’hypertrucage. Ce nouveau règlement vient s’ajouter à une flopée de lois visant à contrôler d’une main de fer l’Internet chinois. L’Administration chinoise du Cyberespace, à l’origine de cette réglementation propose plusieurs solutions afin de lutter contre la désinformation et pour la sécurité de tous sur Internet. Premièrement, les utilisateurs doivent donner leur consentement si leur image doit être utilisée dans une technologie de synthèse profonde. De plus, les entreprises proposant des services d’hypertrucage en Chine doivent obtenir l’identité réelle de leurs utilisateurs. Enfin, les contenus générés artificiellement doivent faire l’objet d’un message d’avertissement destiné aux internautes. Les années à venir seront riches en enseignements pour le régime de Xi Jinping, ainsi que pour d’autres puissances, tels que les États-Unis et l’Union européenne, où la régulation du deepfake est encore incomplète.
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Étudiante en deuxième année d’Info-Com / Anglais, je suis passionnée par la philosophie et la sociologie. L’analyse des rapports sociaux et des tendances sociétales sont mis à l’honneur dans mes articles.
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Grande féministe, j’aspire à mettre des femmes marquantes en avant et informer sur les différents concepts de ce grand mouvement essentiel.