Accord de sécurité avec l’Ukraine, officialisation d’une politique anti-russe

Accord de sécurité avec l’Ukraine, officialisation d’une politique anti-russe

Ce mardi 12 mars, “l’Accord de coopération en matière de sécurité entre la France et l’Ukraine” a été signé et adopté par la majorité des députés à l’Assemblée nationale. Ce texte officialise le soutien politique et économique à l’Ukraine, et affirme une position forte du gouvernement français contre Vladimir Poutine.

Depuis quelques semaines, un sentiment d’insécurité s’installe chez les Français. Ce sentiment est alimenté par une succession de décisions controversées prises par Emmanuel Macron. Le 26 février dernier s’est tenue une conférence internationale de soutien à l’Ukraine en présence de vingt-sept chefs d’Etat européens au Palais de l’Elysée. Les propos qu’a tenus le Président lors de cette conférence n’ont pas manqué d’alarmer les Français. Il dit en effet ne « pas exclure l’envoi de troupes occidentales en Ukraine ». Cette déclaration a rapidement été interprétée comme une attitude provocatrice envers la Russie, et même une volonté d’entrer en guerre.

Depuis, le Président renouvelle les discours dans lesquels il affiche son soutien sans relâche à Kiev, sans pour autant en préciser la nature exacte. Quelques jours après cette conférence, lors d’une visite à Prague, Emmanuel Macron appelle les Européens à « ne pas être lâches ». Il parle de « menace », et affirme que « la guerre est revenue sur notre sol ». Ces paroles puissantes inquiètent certains citoyens qui ont le sentiment de se tenir à l’aube d’une guerre sur leur territoire. Aucun élément concret ne permet pourtant de légitimer ces inquiétudes.

C’est le 12 mars que ce soutien à Kiev s’est concrétisé à l’Assemblée nationale. Après avoir débattu, les députés ont voté en majorité pour l’adoption d’un accord bilatéral de sécurité avec l’Ukraine. Seuls les élus « insoumis » et communistes ne se sont pas prononcés en faveur de cet accord, dénonçant la volonté du Président d’envoyer des troupes françaises en Ukraine. Le RN, de son côté, s’est abstenu.

Un accord économique et politique

Mais alors que prévoit réellement l’accord ? Il s’agit principalement d’une aide financière apportée au gouvernement ukrainien : la France s’engage à donner 3 milliards d’euros en 2024. L’accord, valable 10 ans, prévoit aussi un important soutien politique à Volodymyr Zelensky en s’engageant à soutenir l’intégration de l’Ukraine à l’UE et à l’OTAN. Emmanuel Macron met un point d’honneur à ce que l’Ukraine « rétablisse pleinement son intégrité territoriale dans ses frontières internationalement reconnues depuis 1991 ». Cette clause signifie que la France aidera l’Ukraine à récupérer les territoires conquis par la Russie depuis 2022, à savoir le Donetsk et le Louhansk, mais également la Crimée, annexée en 2014. Il ne précise cependant pas par quel moyen la France aidera à la récupération de ces territoires, en dehors des trois milliards d’euros consacrés à l’Ukraine.

En matière de diplomatie, l’accord bilatéral de sécurité durcit la politique anti-russe du gouvernement français. Emmanuel Macron se dit déterminé à sanctionner sévèrement la Russie si l’attaque se poursuit. Il prévoit notamment une coopération en matière de lutte contre les attaques informatiques. Ces attaques ont déjà touché les hôpitaux français en 2022 et menacent de toucher à nouveau les systèmes informatiques européens. La France va redoubler d’efforts pour contrer les cyberattaques et se défendre de la manipulation de l’information entreprise par la Russie depuis le début de la guerre. Il s’agit d’une priorité selon le Président et les députés ayant voté en faveur de l’accord. L’intérêt de ce texte est aussi de s’assurer que la Russie paye pour la reconstruction des villes détruites, et assume « la responsabilité juridique des crimes de guerre » d’après Emmanuel Macron.

La réponse d’E. Macron aux Français

L’ensemble de ces déclarations a souvent été fait lors de conférences entre chefs d’Etat à l’écart de la population. Le vote à l’Assemblée a aussi été très peu communiqué aux Français en amont. C’est pour ces raisons que les sentiments de défiance et de mise à l’écart ont pris tant d’ampleur de manière générale en quelques semaines. Les décisions politiques successives ont aussi provoqué une vague de rumeurs qui inonde les réseaux sociaux. Selon quelques internautes, l’armée française serait actuellement en période d’exercice intensif de préparation de guerre, et Emmanuel Macron serait en train de consacrer tout son budget à l’entrée en guerre prochaine de notre pays.

Pour dissiper ces rumeurs et appeler au calme, le président de la République s’est exprimé en direct lors d’une interview exclusive sur TF1 et France 2 le 14 mars. Malgré une attitude défensive envers les questions des journalistes, Emmanuel Macron se montre clair et explicite dans son discours. Il estime qu’il est du devoir de notre pays et de ses citoyens de réagir aux invasions que subit l’Ukraine depuis 2022, bien que la France soit une nation de paix. Selon lui, une attitude passive ne revient pas à faire la paix, mais à accepter la défaite de l’Ukraine et par extension de l’Occident. Son objectif est de ne pas laisser la Russie gagner la guerre. C’est pour cela qu’on ne peut pas exclure une intervention des armées occidentales, bien préparées, au côté des troupes ukrainiennes limitées en termes d’hommes et de munitions. Il explique par ailleurs que les réformes militaires qu’il a adoptées au cours de ses deux mandats ont mené à un doublement du budget des armées, mais que ces politiques ont été décidées avant le début de la guerre en Ukraine. Elles concernaient principalement la lutte contre le terrorisme.

L’accord de sécurité conclu avec l’Ukraine suivi de la prise de parole du Président à la télévision affirme une position politique ferme du gouvernement. Comme le dit E. Macron lors de son interview, « ce début d’année 2024 doit être pour nous celui du sursaut ». Il ne s’agit cependant que d’un accord d’aide économique et de soutien politique, et en rien d’une incitation à la guerre.

Carla Defay

Crédits photo : Mathias Reding – Pexels

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