Le 24 février 2025 marque le triste anniversaire de l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Trois ans plus tard, le conflit fait toujours rage, et continue de détruire des vies, des infrastructures, mais aussi le climat. Une étude récente dresse un bilan alarmant de son impact environnemental, révélant une empreinte carbone colossale.
Après trois longues années de guerre, des experts du climat font le bilan dans une étude publiée ce lundi 24 février. Menée par l’Initiative on Greenhouse Gas Accounting of War, l’analyse dresse le lourd tableau des émissions de gaz à effet de serre liées au conflit. Avec le soutien du gouvernement suédois, de l’Ukraine et de la Fondation européenne pour le climat, le collectif de chercheurs met en lumière l’ampleur du désastre environnemental.
Depuis le 24 février 2022, près de 230 millions de tonnes équivalent CO2 ont été émises, soit l’équivalent des émissions annuelles de l’Autriche, de la Hongrie, de la République tchèque et de la Slovaquie réunies. L’étude compare ces émissions à celles de 120 millions de voitures par an. Cette dernière année, les émissions carbone en Ukraine ont augmenté de 31%.
Dans leur diagnostic, les experts prennent en compte un large panel des conséquences liées à l’invasion. De la consommation de carburant des véhicules lourds, l’acier et le béton nécessaires à la fortification et les éléments de défense, en passant par les émissions liées aux réfugiés fuyant les zones de guerre. De ces données émergent les principaux postes d’émissions.
Le premier concerne les émissions liées au secteur militaire, avec 82 MtCO2e émises depuis 2022. À travers la consommation des véhicules lourds, mais surtout le rôle conséquent de l’aviation. Un des postes les plus polluants, l’aviation est responsable de l’émission de 14 millions de tonnes équivalent CO2. L’impact carbone de la reconstruction des infrastructures et des bâtiments endommagés représente le deuxième poste avec 62 MtCO2e. Récemment, les attaques intensifiées contre les infrastructures énergétiques ont conduit à une augmentation de 16% des émissions.
Des incendies qui prennent de l’ampleur
En forte augmentation cette année, la troisième catégorie ne cesse de grimper dans ce triste classement. En 2024, les incendies ont décimé plus de 92 000 hectares de forêts, contre 7000 en 2022 et 29000 en 2023. À eux seuls, les feux de 2024 ont généré 25,8 MtCO2e, soit davantage que les émissions cumulées de 2022 et 2023 (22,9 MtCO2e).
La sécheresse intense de l’été dernier en Ukraine a largement favorisé la transformation de petits foyers en incendies incontrôlables. Si le réchauffement climatique détient un rôle majeur, les affrontements ont créé des conditions propices à ces départs de feu.
Bombardements et explosions, crashs de drones, mines explosives, feux de camp de soldats… Les facteurs militaires restent la principale cause de ces incendies, d’autant plus difficiles à maîtriser que l’intervention des pompiers en zone de combat représente un risque trop élevé. Le conflit intervient au sein d’un cercle vicieux dans lequel réchauffement climatique et lutte armée s’alimentent et se dégradent mutuellement. L’étude dénonce un “exemple inquiétant” de ce nouveau cycle destructeur. Ces incendies favorisés par le réchauffement climatique et les attaques ont fait grimper en flèche les émissions de carbone, mais aussi la destruction de la végétation et d’autres puits de carbone.
L’Ukraine engage la responsabilité de la Russie de cet écocide au coût mondial
Svitlana Grynchuk, ministre ukrainienne de la protection de l’environnement et des ressources naturelles alerte à ce sujet sur des “dommages environnementaux” qui ne “connaissent pas de frontières” et sur la “crise climatique à laquelle le monde entier est confronté aujourd’hui ».
« Ce rapport est un document important qui permet de tenir la Russie pour responsable des dommages qu’elle cause à chacun d’entre nous« , ajoute-t-elle.
Sophie Marineau, doctorante en histoire des relations internationales, dénonce l’utilisation de ces “désastres environnementaux et des dégâts provoqués” par Vladimir Poutine comme arme de guerre. Dans un entretien à Reporterre, elle qualifie ces actions d’écocide. Le groupe d’experts estime le montant des dommages climatiques causés par l’invasion à plus de 42 milliards d’euros, sur la base du “coût social du carbone”, fixé à 185 dollars américains par tonne d’équivalent CO2. L’Ukraine réclame que ce coût climatique soit pris en compte dans les futures négociations de paix. Cette considération serait une première historique.
L’étude, coécrite par Svitlana Krakovska, scientifique ukrainienne et membre du GIEC, est présentée à l’occasion de la 62e réunion du groupe à Hangzhou, en Chine. Les données révélées restent pour le moment préliminaires, certaines n’ayant pas encore été dévoilées. Une évaluation plus approfondie est attendue au printemps 2025, comprenant des potentielles sources d’émissions supplémentaires.
Maddy Echeveste
Crédits : Алесь Усцінаў – Pexels

Étudiante en deuxième année de licence Information Communication et… pas du tout intéressée par le journalisme finalement ! Mon rêve c’est plutôt la communication publique, avec une petite touche d’écologie. Mais bon en attendant j’essaye de partager au mieux les sujets qui m’intéressent.