Parisiens au pays de la chocolatine

Ca ne concerne désormais plus uniquement le foot, un fort sentiment d’hostilité habite depuis quelques temps de plus en plus de bordelais envers des parisiens néo-arrivants dans leur capitale girondine. Un afflux notamment engendré suite à l’avènement de la nouvelle Ligne Grande Vitesse, reliant les deux métropoles en quelques deux heures. Mais que se passe-t-il à Bordeaux ? A-t-on été trop ambitieux ? Ces individus du nord au langage surprenant usant d’expressions telles que « pain au chocolat » vont-ils parvenir à s’intégrer ?  Bordeaux est-elle en voie de parification ? Un flot de questions plus puissant que le flow de Booba.

On pèse le pour, le contre et on remet les choses en place !

Hyper-migration 

Il ne s’agit pas d’une nouveauté, la ville lumière n’est plus aussi attirante et clinquante qu’elle l’a été. Pour conséquence, le délaissement de la capitale au profit de métropoles régionales pleines de fraîcheurs et d’air pur, telles que Rennes ou Bordeaux. Ce sont d’ailleurs leurs régions qui s’affichent fièrement dans le métro parisien.

Des parisiens d’ailleurs bien réceptifs à cette invitation. S’en suivent alors des migrations à répétition et qui ne sont pas à regretter : comment s’attrister de l’arrivée d’un nouveau potentiel économique et culturel ? Hélas, ces déplacements concernent en grande partie le logement et non l’activité professionnelle. Des parisiens à la recherche d’un autre cadre de vie. Quoi de mieux pour flatter l’orgueil des grands maires provinciaux que ce mouvement dans lequel est perçu l’occasion de faire un petit pied-de-nez à la capitale. Alain Juppé, maire de Bordeaux, n’a pas non plus dérogé à la règle, en témoigne l’affiche déployée par la mairie en bas de cet article. Évidemment, tu viens de descendre en bas de la page et tu ne sais plus où tu en étais. Pas de panique, tu en étais là : mais alors, comment réagissent les provinciaux ?

Front de Libération Bordeluche face au Parisianisme

Assez évocateur. Ce mouvement, diffusé au travers de la page Facebook du même nom, symbolise le ras-le-bol de quelques bordelais concernant l’afflux parisien sur leurs terres du Sud-ouest, mais de manière humoristique. Vantant les nombreux inconvénients de leur ville, ils cherchent à la rendre répulsive. Pas facile quand on sait qu’il n’y a en fait pas tant que ça (phrase totalement objective). Mais ce qui se passe dans les rues de Bordeaux depuis quelques temps ne fait plus rire personne, à tel point qu’Alain en personne a voulu saisir la justice.

 

 

La raison n’est pas la soudaine popularité de Pop-Up, mais le déploiement d’affiches arborant le slogan : « Parisien, rentre chez toi. ». Les auteurs ne sont pas connus mais leurs motivations sont elles évidentes. En effet, les prix de l’immobilier ont explosé dans l’hypercentre et la proche périphérie, un bond de 44% en 10 ans, ayant notamment eu pour conséquence la montée inquiétante du nombre d’étudiants SDF à la rentrée. Des travailleurs parisiens logés à Bordeaux, à côté d’étudiants bordelais non logés. Autre chef d’accusation : la gentrification (mot qui claque pour dire qu’un lieu s’embourgeoise) de quartiers perdant leur identité originelle.

Avec la nouvelle LGV, les coupables sont donc tout trouvés et désormais priés de regagner leur Paris morose et plus rose.

 

 

Les envahisseurs 

« Ils sont là, partout, dans les campagnes, sur les réseaux sociaux…. » comme a pu dire la candidate Le Pen. Mais elle ne parlait absolument pas de la gentrification des centre-ville, d’ailleurs personne ne sait de quoi elle parlait.

Soyons pragmatiques, les parisiens ne peuvent évidement pas être tenus pour seuls responsables de la flambée des prix de l’immobilier. Le phénomène s’inscrit dans une dynamique beaucoup plus large.

Flash back : dans les années 50. En France, les centre-villes ne sont pas si aimés que ça et n’offrent pas les caractéristiques d’aménagements que l’on connaît aujourd’hui dans les grandes villes. C’est alors que les politiques publiques visant à leur redonner commodités et attractivité sont lancées.

A Bordeaux, on a l’avènement en 1963 du quartier d’affaires Mériadeck et de ses bâtiments commerciaux, attirant riches propriétaires.

Ca se joue aussi sur le plan culturel : on trouve à Nantes par exemple, la requalification des usines LU de la ville, en Lieu Unique, grand centre culturel.

Les classes moyennes et élevées réintroduisent le cœur des villes au détriment des classes populaires et entraînent une montée des prix. La gentrification recompose l‘identité des quartiers. Une dynamique qui ne s’est pas arrêtée jusqu’à aujourd’hui.

Devenir propriétaire sur les quais de Bordeaux n’est donc pas chose aisée. La mixité sociale y est depuis longtemps devenue difficile. Il va néanmoins falloir gérer ces déplacements amenés a continuer, qui occasionnent plus de contestations que les punchlines de Nadine Morano. Car au final on ne peut reprocher à quiconque de vouloir rejoindre la plus belle ville de France.

 

 

Maxime Giraudeau

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