Le formidable Monsieur Aznavour

Le formidable Monsieur Aznavour

La salle de cinéma est remplie et les spectateurs ont entre 6 et 80 ans. Les têtes bougent au rythme des chansons de Charles Aznavour, les sourires fusent et les larmes coulent. Monsieur Aznavour, réalisé par Grand Corps Malade et Mehdi Idir, est sorti en salle le 23 octobre 2024. L’interprétation de Tahar Rahim rend hommage à celui qui continue de faire chanter toutes les générations. 

Interpréter Charles Aznavour est un pari risqué que s’est lancé Tahar Rahim, l’étoile montante du cinéma. Imiter les mimiques, trouver le grain de voix, les regards, les postures représente des mois de travail acharnés. Comment réussir à émouvoir les gens, attirer les générations, faire vibrer le public. 

Malgré de nombreuses critiques, bonnes comme mauvaises, une chose est sûre : c’est un pari gagné pour Tahar Rahim. Malgré son peu de ressemblance avec Charles Aznavour et les appréhensions de la critique, l’acteur a su dans son regard et ses gestes nous donner l’illusion le temps de deux heures d’être face aux archives de la vie du chanteur. Selon Femme actuelle : « Tahar Rahim rend bien la tension entre la pudeur, le masque social et les douleurs rentrées. »

Les biopics sur la vie d’artistes fusent, il est donc toujours délicat d’en sortir un et de se démarquer. Noté 4,3/5 sur Allociné et 6,6/10 par SensCritiques, les avis divergent. Les négatifs soulignent la banalité de la tournure de l’histoire, jugée comme simpliste, ou qualifiée d’“une logique tristement cumulative” selon Kritikat. A contrario d’autres biopics, comme notamment Elvis sorti en 2022, où l’histoire est traitée au travers de l’œil du manager d’Elvis Presley. Mais c’est justement la simplicité du scénario qui attire, car les spectateurs et auditeurs de Charles Aznavour s’attendaient à découvrir plus en profondeur sa vie, et surtout d’entendre et connaître l’origine de ses musiques. 

Le film retrace près de 65 ans de carrières, l’origine du chanteur, ses débuts, ses rencontres telles que celle avec Edith Piaf, ses amours, ses victoires et ses défaites. Ce qui reste le plus marquant, c’est l’histoire des musiques. Comment a-t-il écrit la bohème, hier encore ou alors comme ils disent. Monsieur Aznavour est scindé en plusieurs chapitres, chacun nommé du titre d’une de ses chansons. Le film commence avec la musique deux guitares, titre qui fait référence à ses origines arméniennes, où l’on voit l’enfant Aznavour chanter et danser dans le petit restaurant parisien de ses parents. Petit à petit, on découvre les “galères” comme il les appelle, la pauvreté, le racisme auquel il a dû faire face, les jugements sur son physique ou de sa voix. On remarque sa persévérance, sa peur de rien et surtout sa détermination. Et il est intéressant de notifier le réalisme, Charles Aznavour n’est pas présenté comme un homme sans défaut. Ses amitiés, amours ou relations professionnelles montrent un artiste torturé, prêt à tout, même du pire pour réussir. Mais aussi son avant gardisme, notamment avec son titre risqué pour l’époque, “comme ils disent”, Charles Aznavour interprète à la première personne du singulier un homme homosexuel qui raconte une soirée où il se travestit dans des bars, ce qui était tabou en 1972.

Ce qui reste marquant, c’est l’universalité de ce biopic. Les salles sont remplies, tous types de personnes sont présentes, des hommes et des femmes de tout âge, qui marmonnent les chansons et bougent leur tête. Et c’est en cela que le pari de grand corps malade et Mehdi Idir est réussi. Ils ont réussi à réunir. Comme vu aux jeux Olympiques, dans des bars, aux soirées ou dans des écouteurs, Charles Aznavour vit toujours. Au travers des générations, il a su laisser une empreinte indélébile. Au point où, presque cent ans après sa naissance, la France se rue dans les salles de cinéma pour en découvrir plus cet homme pourtant pudique quant à sa vie personnelle.

Clara Neuffer

 

Crédits photo : Affiche promotionnelle

 

 

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