Entretien avec Alain Giresse : “On a amené les Girondins à leur destruction” 

Entretien avec Alain Giresse : “On a amené les Girondins à leur destruction” 

Les Girondins de Bordeaux, club emblématique du football français, a vécu une véritable descente aux enfers cet été. En effet, rétrogradé administrativement de la ligue 2 à la National 2 (championnat amateur), le club, tel qu’il était autrefois, n’existe plus sous la même forme. Alain Giresse, ancien joueur mythique des Girondins et ancien international français nous a livré ses sensations sur cette situation dramatique. 

 

Quel est votre sentiment sur la situation des Girondins de Bordeaux ? 

C’est triste, dramatique, catastrophique. Tous les adjectifs qui démontrent le pire peuvent être utilisés. On a amené le club quasiment à sa destruction. Il est toujours en sursis puisque la liquidation judiciaire (disparition) peut tomber à tout moment. Les Girondins ont toujours une épée de Damoclès au-dessus de la tête.

Vous attendiez-vous à une telle chute ? 

Non. Pas du tout. Il y a eu un premier rappel il y a 3 ans quand les propriétaires américains (King Street) ont décidé de vendre le club (été 2021). Le club a ensuite été racheté par Gérard Lopez mais malheureusement, le club est retombé dans le trou. Depuis 6 ans, on s’aperçoit que cela va de dégradation en dégradation. Le club était sur des bases fragiles. Mais jamais, j’aurais pu penser qu’on tomberait aussi bas. C’est incroyable.

Est-ce qu’on aurait pu éviter cela ?

Non. Sportivement, le club n’était pas sur de bon rail. Après le rachat de Gérard Lopez, le club est rétrogradé en Ligue 2 après une saison catastrophique (dernier du classement). Puis arrive les deux saisons en deuxième division où le club n’arrive pas à remonter. Pendant ces 3 années, on s’aperçoit finalement que le sportif n’est jamais rentré en ligne de compte. Les dirigeants qui ont été aux commandes n’ont pas pris la mesure de ce qu’étaient la Ligue 1 et la Ligue 2. C’est les problèmes financiers qui ont dicté le club.

 

“Ce n’est pas du jour au lendemain que la situation financière est apparue comme cela” 

 

En tant qu’ancien joueur du club, quand on a connu des heures de gloires, êtes-vous plus affecté ? 

Évidemment. Les Girondins, c’est une autre partie de ma vie. C’est ici que j’ai eu ma première licence, lorsque j’étais jeune. Toute ma progression et mon apprentissage s’est faite dans les équipes de jeunes des Girondins. Je n’ai pas connu autre chose que ce club-là. Je connais la vie de ce club, son histoire, ses bons moments comme ses moments difficiles, ses succès au plus haut niveau. C’est un pan non négligeable de ma vie qui s’écroule. Je suis en plein délire quand je vois ce qui se passe.

Ne pensez-vous pas que le club a perdu son identité ? 

Outre le fait que le club était plus qu’en difficulté sportivement et financièrement, dans le fonctionnement du club, il n’y avait plus cet esprit Girondins. Notamment, dans les relations avec la sphère girondine, la communauté et les partenaires du club. Pour vous donner un exemple, j’ai vécu plein de soirées que le club animait avec des partenaires, où Gérard Lopez n’était jamais présent. Donc, aujourd’hui, la destruction du club est sur tous les plans.

 

“Pendant les 100 ans du Parc Lescure (Stade Chaban Delmas), Gérard Lopez n’est pas venu saluer les légendes des Girondins (notamment Zidane, Lizarazu…). Il a préféré saluer l’équipe adverse, le Variétés Club de France.” 

 

Le président et propriétaire Gérard Lopez ne souhaite pour l’instant pas quitter le club. Que lui diriez-vous ? 

Il doit s’en aller. Comment peut-on s’imaginer que ce monsieur va pouvoir redresser le club. On va encore partir dans le même mode de fonctionnement. C’est fou. Moi, je n’y crois pas.

Seriez-vous prêt à vous investir aujourd’hui dans le club ? 

À partir du moment où Gérard Lopez est toujours là, c’est compliqué. S’investir, oui, mais sans lui.

Quels mots avez-vous envie de dire aux supporters, malgré tout ce contexte ? 

Ce club a été bafoué, mais il faut continuer à le supporter. On doit garder cet esprit-là. On ne doit pas changer de ligne de conduite. Le chemin va être difficile, mais on ne peut pas (les supporters) abandonner. On ne doit pas dénaturer le club. Je n’en ai pas envie car cela serait faire offense à ce qu’il est.

 

DAABOUR Habib 

 

Crédits photo : Instagram – Girondins de Bordeaux 

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