Bong Joon Ho : entre politique et science-fiction

Bong Joon Ho : entre politique et science-fiction

!! Attention, cet article peut contenir des spoilers !!

Depuis son premier long métrage Barking Dog jusqu’à son dernier projet Mickey 17, le réalisateur et scénariste a su faire ses preuves et se créer une place au sein de l’industrie du cinéma. Six ans après le succès de Parasite, le travail du sud-coréen est de retour sur grand écran depuis le début du mois de mars.

Après des études de sociologie, Bong Joon-ho rejoint l’Académie coréenne du cinéma ayant déjà en tête ce qu’il veut faire de sa vie : écrire et réaliser ses propres films. Ses œuvres engagées abordant des thèmes tels que la lutte des classes, l’écologie ou plus récemment l’immortalité attirent aujourd’hui l’attention des fans de cinéma et ce à  l’international.  

Son premier long métrage Barking Dog, sorti en 2000 ne fait que peu d’entrées bien  qu’il lui permet d’obtenir un prix au festival de Hong Kong. Il faut attendre trois ans pour que  son second film, qui cette fois-ci enregistre plus de 5 millions d’entrées en Corée du Sud, sorte. Pour Memories of Murder, il s’inspire d’une histoire vraie qui se déroule à la fin des années 80, où des jeunes filles sont violées puis retrouvées mortes dans une  petite ville sud-coréenne. Le drame fait beaucoup de bruit, le pays faisant face à l’un de  ses premiers cas de tueurs en série. Pour résoudre l’affaire, une unité spéciale est créée, composée de trois policiers dont les méthodes s’opposent. Tandis que l’un d’entre eux  pratique des méthodes violentes dans le but de faire avouer les suspects, l’autre se base  sur des faits davantage scientifiques.  

Dès son deuxième film, Bong Joon-ho impose son propre style. Les spectateurs, qui s’attendent à une fin digne d’un polar à l’occidental reste comme les enquêteurs sans réponses face à leurs questions.

D’histoire vraie à science-fiction 

Loin de se cantonner à une seule case, Bong Joon-Ho expérimente le genre de la  science-fiction. Il reste toutefois fidèle à lui-même avec des œuvres qui continuent de porter des messages politiques forts que ce soient avec The Host ou Okja pour ne  citer qu’eux.  

Dans The Host, après le rejet de produits toxiques par l’armée américaine, un monstre se crée peu à peu dans les eaux de Séoul et sème la panique causant même une  disparition. Le réalisateur continue dans ce genre avec Snowpiercer sorti en 2013. Tandis  que l’humanité essaie de lutter contre le réchauffement climatique, la planète se retrouve glacée, exterminant presque toute trace de vie sur Terre. Les derniers survivants habitent un train en perpétuel mouvement où ils sont isolés en fonction de leur classe sociale. Dans ces deux réalisations, bien qu’il le tourne à l’extrême faisant preuve d’imagination, le sud-coréen souligne plus particulièrement l’impact humain sur  l’environnement qui l’entoure. 

Une Palme d’or et quatre Oscars plus tard 

Pour son septième long métrage, Bong Joon-ho se penche sur la question des classes  sociales. Il nous invite à suivre l’histoire d’une famille issue de la classe populaire vivant dans un sous-sol, sans emploi stable et qui se retrouve à pirater le wifi des voisins. Lorsque la famille parvient finalement à se faire employer par une famille riche, leurs deux modes de vie sont mis en parallèle. Le réalisateur nous heurte à la violence des inégalités sociales et à l’écart qui se creuse entre les populations les plus riches et les  plus pauvres. Il va jusqu’à illustrer l’ascension sociale par les différents espaces, instaurant une hiérarchie entre le bunker occupé illégalement, le sous-sol des Kim et la  maison d’architecte des Park. Il dénonce également le mépris dont font preuve les Kim quant à l’ancienne gouvernante et son mari lorsqu’ils découvrent leur situation. 

Au court du long métrage, on en vient à questionner nos valeurs morales. Pris  d’empathie pour la famille Kim, qui victime de ce système de classe, tente tant bien que mal de sortir de sa situation, on se demande cependant jusqu’où leur comportement est acceptable. Où se trouve la limite lorsque ces derniers laissent derrière eux de nouvelles victimes ? 

Le film remporte un succès qui retentit à l’international qui lui vaut l’obtention de la Palme d’Or au festival de Cannes en 2019, puis les Oscars de meilleur film, meilleur film  international, meilleur scénario original et meilleur réalisateur en 2020.

Une dystopie à l’américaine 

Après six ans d’attente depuis sa dernière réalisation, son nouveau film sorti en salle au  début du mois de mars était très attendu. Mickey 17 prend place dans un futur dystopique. Mickey et son ami Timo, recherchés sur Terre, décident de s’engager sur un vaisseau spatial en destination d’une planète à coloniser. N’ayant pas de qualification spécifique, Mickey s’inscrit comme « remplaçable« , il sert alors de cobaye pour les expéditions dangereuses et pour les expériences des scientifiques puisqu’ils peuvent  le réimprimer à l’infini. 

Bong Joon-ho aborde des thématiques nouvelles comme l’immortalité et le clonage qui soulèvent des questions d’éthique. Robert Pattinson, dans le rôle de Mickey s’illustre d’ailleurs par ces talents d’acteurs parvenant à jouer un même personnage aux multiples personnalités. Le récit est d’autant plus percutant à une époque où l’espace semble être la prochaine cible des conquêtes. Il ne manque d’ailleurs pas de souligner le caractère dominant qu’ont les êtres humains souhaitant s’imposer à cette nouvelle planète qu’ils considèrent déjà être la leur, une personnalité qui contraste avec le comportement pacifique des Aliens.  

Pourtant rempli de questionnements pour certains, l’œuvre n’a pas atteint les attentes que beaucoup d’autres s’étaient fait et qui l’ont jugé vide de sens et caricatural. On se demande désormais sur quoi portera son prochain projet.

 

Tahiata Gladwin

 

Crédits : Wikipédia 

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