Du 10 au 21 février dernier, la piste de Pokljuka en Slovénie a accueilli l’édition 2021 des Championnats du monde de biathlon, une édition qui nous a encore offert un magnifique spectacle. Comme l’année dernière ou ils avaient obtenu 11 médailles dont 6 en or, ce sont les norvégiens qui ont dominés ces mondiaux. Ils ont remporté 7 des 12 titres mis en jeu et totalisent 14 médailles en cumulé, soit le plus haut total jamais atteint lors d’un même championnat du monde. Derrière cette domination norvégienne outrageuse, la France a fait plus que se défendre puisqu’elle termine ces mondiaux avec 7 podiums dont 2 titres, un bilan qui la positionne comme deuxième nation au tableau des médailles. Retour sur les évènements marquants de la compétition.
La démonstration collective des norvégiens
Sur le site de Pokljuka, perché à 1300m d’altitude, les Norvégiens ont régné en maître sur cette édition des mondiaux, étant alors à la hauteur des attentes suscitées avant la compétition. Ils se présentaient en effet en tant que favoris grâce à leur domination sur les épreuves de Coupe du monde. Chez les hommes, 4 Norvégiens figuraient aux quatre premières places du classement général avant cette échéance. Du côté des femmes, on dénombrait 2 biathlètes dans le top 3 du classement. C’est finalement en toute logique qu’ils ont trusté les podiums durant ces championnats du monde. Sur les 12 épreuves programmées, une seule a vu l’absence d’un biathlète norvégien à l’une des trois premières places.
Avant d’évoquer certaines individualités, il faut mettre en avant la véritable force collective qui émerge de cette nation. La preuve la plus évidente de cette domination se trouve dans les résultats des différents relais. Le relais masculin aura été maîtrisé de main de maître par la Norvège, tout comme le relais féminin et le relais mixte. Trois titres lors des épreuves collectives, auxquels s’ajoute une médaille d’argent lors de la dernière épreuve collective, le relais mixte simple, battu uniquement par l’équipe de France. Il y a un paramètre commun à chacun des titres collectifs acquis par les Norvégiens durant ces mondiaux. A chaque fois ils auront été bien moins précis sur le pas de tir que leurs principaux rivaux. Pourtant, cela ne les a pas empêchés d’être sacrés à plusieurs reprises. C’est sur les skis qu’ils sont parvenus à faire la différence par rapport à leurs concurrents. Un collectif hors normes duquel émergent néanmoins deux noms, et pas forcément ceux cochés initialement.
La domination d’Eckhoff, la révélation Laegrid
Les suiveurs attendaient une domination chez les hommes de Johannes Boe, l’actuel leader de la Coupe du monde, désormais débarrassé de son meilleur ennemi Martin Fourcade, retraité depuis mars dernier. Du côté des femmes, les regards étaient plus portés vers Marte Holsbu Roiseland, quadruple médaillée en individuel lors des derniers mondiaux. Cette année n’aura finalement pas été la sienne puisqu’elle n’aura décroché aucune médaille individuelle. Quant à Johannes Boe, son bilan individuel s’avère lui aussi bien maigre avec comme meilleur résultat une 3e place lors de la poursuite. Ces deux champions auront été éclipsés par leurs compatriotes Tiril Eckhoff et Sturla Laegreid.
La première cité est devenue la star de cette édition des mondiaux puisqu’elle est la biathlète, tout sexe confondu, la plus médaillée. 3 médailles acquises collectivement avec ses compatriotes et 3 autres en individuel. Seule sur la piste, elle a triomphé à 2 reprises, tout d’abord lors du sprint, puis durant la poursuite où elle ne s’est pas laissée rattraper par ses concurrentes. Sa collection de médailles se complète avec une en bronze suite à la mass start. Un triomphe presque total pour cette biathlète de 30 ans qui n’avait jusqu’alors connu le Graal en individuel qu’à une seule reprise lors des championnats du monde, c’était en 2016 sur le sprint. C’est pourtant tout sauf une surprise que de la voir vaincre durant ces mondiaux. Sa domination s’inscrit dans la lignée de ses résultats en Coupe du monde, compétition qu’elle domine au classement cette saison, grâce notamment à ses cinq succès d’étapes. Le cap qu’elle avait du mal à franchir en championnat du monde est désormais franchit de probante manière.
Pour Sturla Laegreid, l’autre biathlète fort de ces mondiaux, les limites étaient en revanche inconnues avant qu’il se présente sur la piste slovène. Véritable révélation masculine de la saison de Coupe du monde, le jeune Norvégien de 23 ans participait à ses premiers championnats du monde élite. La grandeur de l’événement ne l’a absolument pas tétanisé. Fidèle à ce qu’il fait cette saison, Laegreid s’est comporté en vieux briscard avec une maturité remarquable. Après avoir du se contenter de places d’honneur lors des deux premières épreuves (7e du sprint et 6e de la poursuite), il a illuminé de son talent la deuxième partie de ces mondiaux. Deux titres lors des deux dernières épreuves : d’abord sur l’individuel de 20 km, puis sur la mass start en baisser de rideaux de ces championnats. Il s’est comporté en patron grâce notamment à une précision chirurgical sur le pas de tir. Sur les épreuves individuelles, il a réussi 68 des 70 tirs qu’il a eu a réaliser. Une réussite qui n’est pas propre à ces mondiaux mais valable sur l’ensemble de la saison puisqu’il a le meilleur pourcentage de réussite au tir de tout le circuit mondial. Autre fait notable, il devient le premier biathlète sacré double champion du monde en individuel pour ses premiers mondiaux depuis 2007.
Laegreid est clairement en train de devenir la nouvelle étoile du biathlon international, lui qui a pour particularité d’avoir comme source d’inspiration non pas un biathlète de son pays, et pourtant ils sont nombreux, mais celui qui a pendant longtemps été «l’ennemi de la Norvège» : Martin Fourcade. Le grand champion français, comme l’ensemble du milieu, ne manque pas d’éloges au sujet de ce jeune talent. «C’est peut-être la première fois dans l’histoire du biathlon qu’on voit un athlète avec autant de maturité et d’expérience à un âge aussi jeune» a t’il déclaré. Pour pouvoir suivre les pas de son modèle, Laegrid devra désormais confirmer les attentes placés en lui, et elles seront assurément nombreuses.
Les montagnes russes pour les français
Sur le plan purement statistique, les Bleus ont réussi leurs mondiaux. 2 médailles d’or, 2 autres en argent et 3 de bronze qui permettent aux Français de figurer en 2e position au tableau des médailles. Ce bilan s’inscrit largement dans la moyenne des années précédentes et doit même être quelque peu grandit compte tenu de l’absence déjà évoquée du meilleur pourvoyeur de médailles de ces dernières années. Sans le GOAT, la délégation française a donc fait bonne figure à la fois grâce à sa jeune garde et aux «anciens».
Parmi les expérimentés, Simon Desthieux a obtenu sa première médaille individuelle grâce à sa seconde place au sprint, derrière le Suédois Martin Ponsiluoma. Comme un bonheur n’arrive jamais seul, il a pu être accompagné sur la dernière marche du podium par Émilien Jacquelin. Ce dernier a confirmé tout le talent aperçu chez lui l’an passé en remportant de manière magistrale la poursuite, deux jours après le sprint. Une course sensationnelle avec un dernier tir debout effectué à une vitesse et avec une précision impressionnante. En ce 14 février ce n’était plus la Saint Valentin mais la Saint Émilien. La fête sera hélas finie pour le Grenoblois, qui ne brillera pas lors des dernières épreuves. Il terminera ses mondiaux en pleurs après une 30e et dernière place sur la mass start, consécutive à un énorme raté sur son premier tir debout. Image forte d’un champion au caractère entier.
À l’issue de cette mass start, son compatriote Quentin Fillon-Maillet avait lui le sourire. Il a terminé 3e, sauvant alors des mondiaux particulièrement frustrants pour lui. Deux fois 4e et une fois 6e, le Jurassien a enfin vu le sort s’inverser, avec une médaille de bronze venant récompenser sa persévérance.
Fortunes diverses également pour les femmes. Absente des mondiaux l’an passé pour cause de maternité, Anais Chevalier-Bouchet est revenue sur le devant de la scène de la plus belle des manières. Deux belles médailles dans sa poche, une en argent sur le sprint et une autre en bronze grâce à la poursuite. En revanche pour ses coéquipières de l’équipe de France, il n’y a malheureusement pas beaucoup de positif à retirer de ces championnats. Aucun top 10 en individuel pour Justine Braisaz-Bouchet, comme pour Anais Bescond. Même sentence pour Julia Simon, elle qui représentait sûrement la meilleure chance de médaille chez les filles grâce à ses succès en Coupe du monde lors de deux mass start. Tantôt elles ne furent pas assez rapides sur les skis, tantôt elles furent imprécises au tir. Bref, c’est plutôt la déception qui domine.
Les relais de leur côté n’auront pas été synonymes de médailles pour les Bleus, à une exception, et quelle exception, puisqu’il s’agit du titre en relais mixte simple obtenu par la paire Julia Simon – Antonin Guigonnat. Les Français ont dominé au finish le duo norvégien, composé quand même de Tiril Eckhoff et Johannes Boe. Ce titre permet ainsi à la jeune française de 24 ans de glaner sa toute première médaille en championnat du monde.
Une fois encore, les mondiaux de biathlon auront tenu toutes leurs promesses, malgré la regrettable absence du public. Pour l’ensemble des biathlètes, le repos n’est toujours pas à l’ordre du jour. Il reste trois étapes de Coupe du monde à disputer le mois prochain, de quoi aiguiser les appétits de tous ces compétiteurs, dont certains seront obligatoirement revanchards.
Mathias Babin
Crédits: Matthias Schrader, AP – Nordic Focus – MAXPPP, Antonio Bat – AFP, Joe Klamar
Etudiant en licence Information-Communication. Rédacteur dans la rubrique Sport car passionné de rugby, de football, de sports mécaniques, de handball…bref, fan de sport en général.
Contact : mathias3334@gmail.com