Le Liban sombre de plus en plus dans la pauvreté. Autrefois surnommé la « Suisse du MoyenOrient », cela fait plusieurs dizaines d’années déjà que le pays a passé son âge d’or. Gouvernement immobile, baisse du pouvoir d’achat, pannes d’électricité… Comment l’ex-pays prospère est-il tombé si bas, et comment les Libanais survivent-ils à la situation ?
Les débuts d’une crise alarmante
Cela fait déjà deux ans que le Liban s’enfonce dans un désordre économique, social et politique. Le pays, qui comptait autrefois sur des entrées de flux financiers étrangers pour se développer, a vu la valeur de sa monnaie baisser de 90% depuis 2019. Dans le même temps, l’inflation est fulgurante : jusqu’à 500% pour certains produits alimentaires de base. Mais que fait le gouvernement face à cela ? Rien, justement. Les Libanais se plaignent d’une classe politique empreinte de corruption et de clientélisme. Alors que la formation d’un nouveau gouvernement occupe les dirigeants, les investissements nécessaires à la société sont oubliés. Les axes routiers sont en piteux état, de même pour le réseau électrique, sans compter que le carburant n’arrive plus dans le pays. Les centrales électriques n’alimentent les villes que quelques heures par jour, les habitants se retrouvant en plein « black-out », comme récemment à Beyrouth, le 9 octobre dernier. Ne disposant aujourd’hui que de peu de moyens financiers et d’infrastructures de plus en plus décadentes, les Libanais peinent de plus en plus à subvenir à leurs besoins quotidiens.
Liban: blackout à Beyrouth où les centrales électriques sont à sec sur Orange Vidéos
Un basculement vers la pauvreté
Autrefois, la vie d’un individu de classe moyenne au Liban, c’était un quotidien sans difficultés financières. C’était la vie de quelqu’un qui pouvait aisément se financer des voyages ou une voiture. C’était aussi vivre sans avoir à se soucier du financement de l’école privée de ses enfants… Aujourd’hui, pour la majorité, ce quotidien n’existe plus. Avant, le taux de personnes vivants sous le seuil de pauvreté était de 30%. Désormais, cela concerne 50% de la population.
La réduction du pouvoir d’achat est flagrante. Avec si peu de moyens, les habitants peinent à se procurer les produits quotidiens de base, pour peu qu’ils soient disponibles à l’achat. Certains foyers sont contraints de retirer leurs enfants des écoles privées, ou encore de renoncer à des produits pharmaceutiques. Ce changement radical de vie donne naissance à une population dite de « nouveaux pauvres ». Mais outre ce basculement économique et ces manques financiers, le quotidien des habitants est rythmé par des pénuries d’une toute autre nature…
La chasse aux ressources essentielles
Endetté mais obligé d’importer son carburant, le Liban est sujet à de grandes difficultés d’approvisionnement. Alors lorsque les camions citernes arrivent enfin dans les stations essences, on se bouscule pour tenter de faire son plein. Chaque jour, les Libanais font face à l’imprévisibilité. Des centaines d’individus font la queue quotidiennement dans un but : obtenir de quoi se déplacer pour aller faire ses courses, ou simplement aller travailler.
Alors que les chauffeurs de taxis se retrouvent au chômage technique, faute de carburant, cette pénurie a des conséquences encore plus désastreuses. Sans carburant, les centrales électriques ne peuvent fonctionner. Et sans centrales électriques, pas d’électricité pour les 7 millions d’habitants du pays. Par conséquent, le quotidien des Libanais est rythmé par des changements de luminosité – lorsque l’éclairage s’éteint-, par des repas à base de conserves – faute de frigo -, et par des appareils électriques inutilisables. Les quelques heures de courant par jour ne suffisent pas à combler les besoins des individus et mettent également en danger leur vie professionnelle.
A titre d’exemple, un coiffeur à Beyrouth est contraint de déprogrammer sa clientèle lorsque l’électricité est coupée dans son salon. Sur Arte, il explique : « Je suis en colère car c’est l’Etat qui nous met dans cette situation où l’on ne peut rien faire. » Pour franchir cette impasse, plusieurs tentent de contourner le problème. Tandis que certains mettent en place des groupes électrogènes, d’autres passent par le marché noir pour se procurer du carburant. Mais cette solution n’est bien évidemment ni accessible à tous, ni viable sur le long-terme.
Alors que ses habitants tentent de garder la tête hors de l’eau, l’explosion du port de Beyrouth survenue en août 2020 n’a fait que raviver les tensions dans le pays. Ce jeudi 14 septembre, un rassemblement contre le juge Tarek Bitar chargé de l’enquête sur cet incident, a donné lieu à de violentes altercations. Le bilan s’élève à 6 personnes décédées et des dizaines de blessés. Le Liban semble alors faire face à un déséquilibre d’une grande envergure, tant sur l’aspect économique, que politique et sociétal. Mais pour le moment, difficile de dire comment le pays pourrait remonter la pente.
Crédits : Dylan Collins/AFP FR
Cécile Praille
Etudiante en licence information-communication/anglais, je m’intéresse un peu à tout : dessin, peinture, musique, astronomie, langues étrangères… J’aime garder un œil sur le monde qui nous entoure et écrire sur des sujets qui m’accrochent.