How To Have Sex : un portrait de l’adolescence déroutant de réalisme

How To Have Sex : un portrait de l’adolescence déroutant de réalisme

À l’occasion du festival du film de Sarlat, j’ai eu l’opportunité de regarder How To Have Sex de Molly Manning Walker en avant-première. En sortant de la salle, j’avais la sensation d’avoir apprécié le film sans trop savoir pour quelle raison. J’ai donc laissé à mon esprit le temps de mieux réfléchir afin d’avoir le plus de recul possible sur cette œuvre. Cela fait maintenant un mois que je suis sortie de cette salle, je pense dorénavant pouvoir donner un véritable avis sur ce film. 

 

How To Have Sexe est un long-métrage de Molly Manning Walker. Jeune réalisatrice montante ces dernières années, Molly Manning gravit les échelons avec succès pour nous proposer son premier long-métrageHow To Have Sexe a pour thème principal l’adolescence, le viol et le consentement. Des thèmes qui peuvent être durs et délicat à adapter à l’écran. Récompensé par le prix « Un certain regard » du festival de Cannes, il faut avouer qu’How To Have Sex n’a pas laissé son public indifférent.

Le film nous narre l’histoire de Tara, Em et Skye, trois meilleures amies âgées de 16 ans partant en vacances à la station balnéaire de Malia sur l’île grecque de Crète. L’objectif de ses vacances pour les filles sera de boire et de sortir en boîte. Tara étant la seule vierge parmi ses amis, elle ressent une certaine pression durant ses vacances. Faisant la rencontre d’un groupe de jeune plus âgée qu’elle, Tara va vivre sa première expérience sexuelle avec l’un des garçons de ce groupe.

Le cœur du long-métrage est centré sur le personnage de Tara, incarné par Mia Mckenna-Bruce. On y découvre au début de l’histoire une fille pleine d’énergie, joyeuse et insouciante. Plus le récit va avancer, plus l’on va avoir l’impression que le personnage se perd, succombant à la pression de perdre sa virginité pour ressembler à ses amies en faisant confiance à la mauvaise personne. La relation d’été qu’elle va entretenir avec le personnage de Paddy va vite devenir de plus en plus gênante pour Tara, ayant sans doute trop peu de recul sur ce que doit être une relation sexuelle consentie et appropriée. En tant que spectateur, on ressent très vite une certaine compassion envers le personnage. Néanmoins, on peut reprocher au film de ne pas avoir assez développé les autres protagonistes. Les deux copines de Tara semblent fades comparées à elle, voire détestables par moment, le personnage de Paddy quant à lui représente l’archétype de l’homme dominé par ses pulsions. Le personnage de Badger aurait pu être un personnage très intéressant dans l’intrigue, présentant une réflexion intéressante par moment et voyant que la situation que vit Tara n’est pas normale.

L’aspect le plus intéressant du film est sans aucun doute le traitement qu’il fait du consentement et du viol. Alors que beaucoup de films proches du mouvement #MeToo apparaissent ces dernières années, How To Have Sex ne s’inscrit pas réellement dans cette vague. Effectivement, il dénonce les abus que peuvent subir les femmes lors de fête et que cela paraît plus commun qu’on peut le croire. Toutefois, jamais le mot viol, ni consentement n’est prononcé dans le film. On a l’impression que le film veut nous faire tourner autour du pot, voir si le personnage de Tara réalise vraiment ce qui s’est passé. C’est lors de la scène finale que l’intrigue apporte une conclusion à cette question. Tara se rend bien compte qu’elle a été abusée par Paddy et décide d’en parler à Em alors qu’elles vont prendre l’avion pour rentrer chez elle. Ce qui surprend dans cette scène est la manière dont Tara affronte cette épreuve. Le personnage décide de ne pas se laisser abattre par les événements, que les vacances ne sont pas encore terminées et qu’il faut continuer à vivre malgré tout. Ce choix audacieux et surprenant donne une autre vision de la manière dont on peut surmonter ce genre d’épreuve. Malgré le fait que cette fin ne plaira pas au plus large public, elle a tout de même le mérite d’exister et de proposer une vision personnelle.

Il serait injuste de ne pas parler du style visuel que nous propose Molly Manning Walker. La première chose qui nous marque lorsque l’on regarde ce film est son aspect proche du documentaire. La narration passe souvent au second plan pour nous laisser face à de longs plans décrivant parfaitement la situation. L’un des plans les plus marquants du film est un plan large montrant le personnage de Tara, marchant seule d’un air fatigué et anxieux. Un travelling arrière vient sublimer cette scène, montrant une rue délabrée par la fête, Tara paraît être de plus en plus seule, laissée par ses amis, mais aussi par le garçon avec qui elle a partagé un moment intime il y a quelques heures. En une image, il nous est possible de comprendre parfaitement ce que peut ressentir la jeune fille, et d’y ressentir une forme d’empathie. Les scènes de fêtes retranscrivent elle aussi parfaitement l’ambiance « springbreak » du film. D’un ton très coloré et flashy d’un côté, les scènes sont aussi descriptives et analytiques de l’ambiance qui règne, permettant à la fois d’avoir un degré immersif tout en gardant son côté documentaire.

 

How To Have Sex fut pour moi une magnifique découverte, par son approche ambitieuse d’un sujet délicat et épineux. Elle m’a permis, par mon regard masculin, de potentiellement mieux comprendre la délicate situation que peuvent avoir à faire face certaines filles rentrant dans le monde adulte. Ses visuels proches du documentaire sont aussi un énorme atout, ajoutant une véritable identité propre au film, se détachant des films d’adolescents pour donner un fond mature et réaliste au spectateur. Je recommande vivement d’aller voir ce film, d’en faire sa propre expérience, car selon moi, il peut vous apporter une vision complémentaire aux sujets que sont le consentement et le viol.

 

Crédits photo : Allociné

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