Vous poussez la porte de la boulangerie, le masque sur le nez et l’attestation à la main, au comptoir, pas de boulangère mais votre meilleur ami jonglant avec des bouteilles, soudain des néons apparaissent et vous vous retrouvez à danser en compagnie de votre grand-mère et de Patrick Sébastien. Oui, vous êtes en plein rêve. Et non vous n’êtes pas la/le seul(e) à avoir un sommeil aussi extravagant en ces temps de confinement.
Le sommeil mis à rude épreuve
Le sommeil n’a pas été épargné par les effets du confinement, les français ont le sommeil d’avantage perturbé qu’à l’habitude. Selon Linda Lasbeur (chargée de projet scientifique à la direction de la prévention et de la promotion de la santé de Santé publique France) le pourcentage de personne ayant rencontré des difficultés à s’endormir aurait augmenté de 16 points au premier confinement : passant de 50% avant le début de l’épidémie à 66% vers la fin du confinement.
Et ce qui est encore plus frappant, c’est que ces perturbations se sont également amplifiées chez les jeunes, qui sont normalement moins sujet à de tel trouble du sommeil. Manque d’activité physique, augmentation du temps passé devant les écrans et changements de mode de vie peuvent expliquer ce phénomène.
L’effet cathartique des rêves
Le confinement n’a pas seulement perturbé le sommeil mais a aussi augmenté les angoisses nocturnes, rêves stressants et cauchemars. Perrine Ruby (chercheuse à l’Inserm) et son équipe du Centre de Recherche en Neurosciences de Lyon ont effectué une enquête inédite sur le sommeil lors du premier confinement. Avec 6.000 réponses et plus de 1.500 récits de rêves, ils ont pu établir les tendances générales des dormeurs français. Selon cette étude, 15 % des personnes interrogées disent avoir eu des rêves plus négatifs qu’habituellement.
L’augmentation des rêves négatifs ne fait que refléter la situation que nous vivons. Pour beaucoup, le confinement est une période stressante, remplie de doutes sur l’avenir, d’inquiétudes pour la santé des proches mais surtout ayant radicalement changé le quotidien. Pour certains spécialistes, les rêves auraient une fonction d’adaptation émotionnelle et nous permettraient de nous acclimater à cette situation nouvelle et compliquée.
Pour le docteur Royant-Parola, les rêves sont en grande partie inspirés de ce que nous vivons au cours de la journée. Il est donc logique que les angoisses du jour se répercutent sur nos nuits.
Les rêves auraient également un effet cathartique : réaliser nos pires scénarios mentaux dans notre sommeil serait un moyen de les évacuer de notre esprit et ainsi de pouvoir nous libérer du poids des soucis.
Repas en famille, soirée entre ami(e)s ou rêves érotiques…
Notre imagination s’en ai aussi donnée à cœur joie de ce côté-là. 7% des personnes interrogés lors de l’étude racontent avoir eu des rêves plus positifs. Cela peut s’expliquer par le manque de stimulation durant la journée. Nos rêves ont été une sorte de compensation face à notre quotidien vide d’aventures.
De nombreuses personnes relatent aussi le fait de rêver davantage de souvenir ancien : vacances passées ou proches décédés… Notre inconscient s’inspire de la réalité que nous vivons pour façonner nos rêves. En cette période où nos journées sont moins palpitantes, notre cerveau a tout simplement puisé dans la mémoire à long terme pour construire nos rêves, faisant ainsi remonter des souvenirs bien enfouis.
Vie onirique intensifiée
Selon un article de Le Monde, en temps normal un adulte se souvient, d’environ un à trois rêves par semaine. Même si nous avons l’impression d’avoir fait plus de rêve pendant le confinement, c’est bien les souvenirs de notre vie onirique qui ont augmenté.
Il existe 4 phases durant le sommeil : l’endormissement, le sommeil léger (qui représente 50% du temps de sommeil), le sommeil profond (celui pendant lequel nous nous reposons le plus) et le sommeil paradoxal. C’est lors de cette dernière étape que l’activité cérébrale est la plus intense et que les rêves sont les plus longs et élaborés. En se réveillant au cours de celle-ci nous avons donc plus de chance de nous rappeler de nos rêves. Ainsi, le confinement, en accentuant les réveils nocturnes a également favorisé les souvenirs de nos rêves.
A l’opposé de cette tendance, une partie des français raconte ne rêver de rien durant cette période. Un phénomène tout aussi intéressant, comme si notre inconscient s’était lui aussi confiné et avait cessé de s’exprimer.
Si le confinement nous a privé d’un grand nombre de nos libertés, il ne nous a pas confisqué celle de dormir… et heureusement ! Les rêves nous ont permis de nous évader du quotidien. Jouant d’un côté le rôle d’échappatoire et de l’autre celui du psychologue, nous aidant à évacuer les angoisses de la journée. Alors, chérissons notre sommeil et profitons de la fin du confinement pour explorer les profondeurs de notre inconscient !
Telma Valero
Sources images : elpupitredepilu.com et sleepnolonger.com
Étudiante en information communication et espagnol, toujours prête à m’exprimer sur les sujets qui me touchent !