Un mardi après-midi au tribunal correctionnel de Bordeaux…

Un mardi après-midi au tribunal correctionnel de Bordeaux…

14h, le président appelle à la barre Fethi Latrach. Accusé de vol par escalade dans un local d’habitation et de conduite sans permis, à 38 ans, le prévenu est un multirécidiviste. Reportage.

 « L’audience est ouverte ! »

Silence dans l’assemblée. Dans la 7ème chambre des comparutions immédiates du tribunal correctionnel de Bordeaux, la cour d’appel est en place. Le public s’installe sur les sièges en bois de la salle. L’ambiance est lourde, silencieuse, tous attendent l’arrivée du premier prévenu. Les regards se croisent. Certains sont prêts à prendre des notes, d’autres sont simplement curieux. La porte du box vitré s’entrouvre. Deux policiers tiennent fermement l’homme. Ils lui détachent les menottes et le place face au micro, face à l’assemblée.

Grand, chauve, vêtu d’un gilet gris, l’homme semble abattu. Pour Fethi Latrach ce n’est pas la première fois qu’il se trouve face à un tribunal. Le président prend la parole. Il énonce les chefs d’accusation : vol par escalade dans un local d’habitation à plusieurs reprises dont l’une en compagnie de ses enfants, circulation sur le territoire français sans papiers valides, conduite sans permis… Son casier judiciaire ne cesse de s’allonger et compte 25 mentions lors de l’audience. A peine sortie de prison, Fethi Latrach est de nouveau appelé à la barre. Le président l’interroge.

Le public regarde en direction du prévenu. « J’ai perdu ma mère, mon père… Je suis traumatisé » L’homme se défend avec ses pleurs. Le président hausse le ton, insensible aux émotions du prévenu. Il souligne la récidive immédiate du prévenu et son irresponsabilité en tant que père. « On ne commet pas de vol et encore moins en présence de ses enfants ! ».

Entre deux pleurs et un reniflement, le prévenu s’assoit. La procureure se lève. Elle rappelle tous les faits et leurs contextes. Fethi Latrach n’a pas pris en compte les multiples « avertissements qui lui [ont été] faits ». Les poings appuyés sur la table, le regard perçant vers le prévenu, la procureure demande une condamnation d’un an de prison ferme et la révocation des six mois de sursis accordés en 2019 lors de son précédent procès.

Situation précaire

L’avocate de la défense pousse sa chaise, prend en main son papier avec ses arguments et commence son discours. Fethi Latrach est dans une « situation très précaire » souligne-t-elle. Il dort dans sa voiture, n’a plus de moyens financiers, n’a plus de papiers. Le président semble l’écouter partiellement, il discute avec sa voisine de droite, regarde l’assemblée, la procureure. La défense poursuit. Fethi Latrach voulait bénéficier d’une semi-liberté pour éviter une sortie sèche de la maison d’arrêt. Une requête qui lui a été refusée. Les conséquences sont dramatiques.

Sans aides, son client fait, de nouveau, une descente aux enfers. Père de trois enfants, il voulait simplement leur faire plaisir en leur offrant un cadeau, en leur payant un McDo. Il n’a qu’une solution pour cela : le vol. « [Monsieur Latrach s’est mis] dans une situation rocambolesque pour faire plaisir à ses enfants ». La défense de l’avocate s’axe fondamentalement sur l’argument familial et la situation de précarité dans laquelle se trouve l’accusé.

Maître met l’accent sur les démarches engagées par le prévenu : la prise de contact avec une assistante sociale par exemple. Qui plus est, l’affaire ne met en cause aucune victime, il n’y a aucun préjudice. « Le maintien en détention n’est pas justifié » assure-t-elle.

« J’ai envie de m’en sortir, pour moi, pour mes enfants… Je regrette » Fethi Latrach balbutie ces quelques mots avant la délibération du jury.

Une heure plus tard…

Deux prévenus succèdent à Fethi pour d’autres chefs d’accusation. Le président suspend l’audience pour la délibération. Le public se lève, et sort de la salle. Les minutes sont longues, tous attendent le verdict. Les peines de la procureure, vont-elles être appliquées ? Une alarme sonne. « Reprise d’audience ! »

L’ambiance est détendue, sereine. Les membres de la cour d’appel discutent en attendant le premier prévenu. La porte du box vitré s’ouvre une énième fois. Fethi Latrach prend place. Debout face au président, il attend le verdict.

« Coupable » Calmement, le président énonce la peine du prévenu : 12 mois de prison, révocation des six mois de sursis avec mise à l’épreuve, mandat de dépôt. « Monsieur Latrach, vous retourner en détention » ironise avec sarcasme le président. Indigné par la peine, Fethi Latrach assure qu’il fera appel.

Crédit : Pexels

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Camille Juanicotena

Étudiante en M1 Nouvelles Pratiques Journalistiques à Lyon 2, mon but est de devenir journaliste. J'écris sur tout ce qui m'intéresse de la politique à la télé. Tout sujet est bon à traiter.