Déchets : vers un monde sans plastique ?

Chaque année, quelques 300 millions de tonnes de plastique sont produites, selon le Fonds mondial pour la nature (WWF). Un chiffre affolant quand on a en tête les conséquences dramatiques que cela engendre sur l’environnement. Si le plastique est devenu le pire ennemi de tout bon écolo qui se respecte, il reste omniprésent dans notre quotidien et s’en débarrasser semble être un travail de titan… Mais un peu partout dans le monde, des initiatives voient le jour et donnent de l’espoir quant à un avenir sans plastique… Reste à savoir ce que cela vaut vraiment !

Le fléau du plastique

Si le plastique est aussi controversé aujourd’hui, c’est d’abord à cause de sa composition. Ce matériel est issu de la transformation du charbon, du pétrole ou du gaz naturel, tous trois des ressources fossiles, donc épuisables. On distingue plusieurs catégories de plastiques, comme les thermodurcissables (coque de bateau, moule à gâteaux en silicone…) dont on ne peut plus modifier l’apparence une fois durcies et qui sont difficilement recyclables. On les oppose aux thermoplastiques (bouteilles en plastique, flacons, sacs poubelles…), qui sont eux plus facilement recyclables. Mais la pollution due au plastique ne se réduit pas à sa production. En effet, les idées reçues sur le recyclage tendent à dédramatiser la consommation des objets en plastique, en nous promettant de leur donner une seconde vie. Mais la réalité est bien différente. Selon National Geographic « seuls 9 % des déchets plastiques ont été recyclés en 2016 à l’échelle de la planète. L’immense majorité, soit 79 %, est en train de s’amonceler sur les sites d’enfouissement des déchets ». Le bilan est tout aussi effrayant en France, où « seuls 22% des déchets plastiques et 26% des déchets d’emballages plastiques étaient recyclés cette année-là ». Si ces chiffres sont aussi bas, c’est parce que dans l’industrie du recyclage, comme partout, c’est la valeur ajoutée qui prime. Les pays occidentaux se restreignent donc à traiter les déchets qui rapportent le plus et envoient le reste à l’étranger. Les pays receveurs se retrouvent avec de grandes quantités de déchets non triés, dont parmi eux des plastiques non recyclables qui sont amoncelés dans des décharges à ciels ouverts, au détriment de l’environnement et de la santé des travailleurs (voir article « les occidentaux face à leurs responsabilités »). Selon Agnès Le Rouzic, chargée de campagne Océans et Plastique chez Greenpeace : « Les études montrent que les trois quarts des déchets plastiques exportés vers l’Asie ne sont pas traités adéquatement ».

La production et l’utilisation du plastique dans le monde, de 1950 à 2015.

Recyclage : pas si écolo

Même lorsque le plastique est bel et bien recyclé, cela ne réduit pas forcément son impact sur l’environnement. Le processus de retraitement est très gourmand en eau et nécessite l’utilisation de produits chimiques (pour éviter les risques de contaminations). A cela il faut ajouter la pollution générée par le transport des déchets vers l’étranger (souvent vers l’Asie). Enfin, les plastiques ne se recyclent pas à l’infini et les industriels sont souvent contraints d’ajouter des matériaux vierges aux produits recyclés. En effet, ces derniers perdent en qualité au fil des réutilisations.

Le gouvernement français a promis un taux de 100 % de plastique recyclé d’ici 2025. Un engagement qui fait bien sur le papier mais qui est loin de résoudre le problème. Pour Nathalie Gontard, chercheuse à l’Institut national de la recherche agronomique (Inra), « Le plastique recyclé est un paradoxe, dans le sens où l’on ne peut pas recycler le plastique à l’infini », explique-t-elle à France info. « Il faut plutôt se passer de plastique quand on peut le faire, avec du verre ou du métal par exemple, qui, eux, sont vraiment recyclables ».

Bioplastiques, une solution durable ?

Alors si le recyclage n’est pas la solution aux problèmes générés par le plastique, quand est-il des nouveaux matériaux ? Depuis quelques années les scientifiques ne cessent d’innover pour trouver un remplaçant à notre matière fétiche. Le plus connu est le bioplastique : composé de matières végétales (amidon de maïs, bagasse de canne à sucre ou algues), il aurait un impact nul sur l’environnement. Bien que son utilisation reste limitée (3% des emballages ménagers en France), il tend à se développer profitant du mouvement zéro déchets. Mais là encore, il faut différencier les réelles innovations des stratégies marketings. Il parait à première vue plus écologique d’utiliser des ressources naturelles mais il convient de savoir comment celles-ci sont produites. Sylvain Pasquier, de l’Agence de l’Environnement et de la maîtrise de l’énergie, met en garde contre les monocultures intensives qui peuvent être à l’origine de ces matériaux. Celles-ci ont le désavantage d’utiliser des pesticides et de déforester massivement. De plus, tout comme le plastique classique, ces matériaux biosourcés sont très largement produits en Asie (56 %), ce qui ne résout pas la pollution liée à l’importation.

Des champignons pour emballer

D’autres innovations donnent plus d’espoir. Notamment celles qui entendent valoriser des matériaux jusqu’alors inutilisés. C’est le cas d’un plastique fabriqué à partir de carcasses de crustacés mis au point par une startup londonienne. Il serait en théorie 100 % biodégradable. Des nano chimistes chinois ont quant à eux développé un matériel s’inspirant de la structure du nacre et se composant de mica (un minerai que l’on trouve dans la roche) et de cellulose (issue des arbres). Une alternative qui serait robuste et peu coûteuse comparée au plastique.

            Au niveau des emballages, les découvertes sont florissantes : emballages faits à partir de déchets agricoles et de racine de mycélium (champignon blanc), complètement compostables. Ou encore foin compressé pour produire les boîtes d’œufs… De petites avancées mais qui montrent un réel investissement de la sphère scientifique dans la chasse au plastique.

 

 

 

 

 

Dans ce flot d’innovations et d’alternatives soi-disant écologiques, il est difficile de discerner les réelles solutions, du simple greenwashing. D’autant plus que jeter à la poubelle une bouteille en bioplastique, reste quand même jeter. Comme on le dit souvent : le meilleur déchet est celui qu’on ne produit pas… C’est sûrement dans cette phrase que tient la solution au fléau du plastique.

 

Telma Valero

Crédits photos : Culture de Mycélium- © Alex Hyde / Quelle – Flickr. Lizenzfrei, Laurence CHU – AFP, whatisnewinecomaterials

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