Moudjahidate : martyres oubliées.

La Guerre d’Algérie est un conflit armé opposant le peuple algérien aux colons français qui s’est déroulé de 1954 à 1962 et qui résultent de décennies d’occupation et de répression. Pourtant, malgré le caractère marquant de cet évènement historique, la Guerre d’Algérie n’en reste pas moins un conflit peu connu du grand public. Ce n’est donc pas sans surprise que le rôle des femmes algériennes durant cette guerre soit un mystère pour beaucoup. Mais alors, qui étaient celles qu’on nomme les moudjahidate ? 

Contexte historique.

La Guerre d’Algérie éclate en 1954 et est le résultat de la colère d’un peuple face à l’envahisseur français qui répriment leurs libertés. Elle opposera principalement le FLN (Front de Libération Nationale) à l’armée française. Pendant 7 ans, 8 mois et 4 jours, des attentats, des massacres et des répressions auront lieu et se solderont par l’indépendance de l’Algérie en 1962. Mais si bien souvent, on parle des membres masculins du FLN, des femmes ont également participé à la libération de l’Algérie. 

Qui sont les moudjahidate

Le terme moudjahidate signifie combattantes en arabe et désigne les femmes ayant participées au mouvement de libération pendant la guerre. Peu importe leur classe sociale ou leur région d’origine, ces femmes ont assisté aux tortures, arrestations ou encore humiliations perpétuées dans le pays. Elles ont donc une chose en commun : l’intime conviction que le peuple algérien doit être libéré. Si bon nombre d’entre elles étaient dans l’incapacité d’abandonner leur foyer pour rejoindre les rangs du FLN, elles ne se sont pas pour autant découragées. À leur façon, elles ont été d’une aide indéniable pour le mouvement de libération. Depuis leur foyer, celles qu’on appelle les moussebilate vont s’organiser pour héberger, nourrir ou encore soigner les soldats blessés apportant ainsi leur soutien à la cause. Leur implication n’en restait pas moins dangereuse puisque certaines d’entre elles furent capturées et torturées. 

©Zebar Andia

Une petite partie des moudjahidate participaient directement aux actions armées. Ce sont les fidayate, les poseuses de bombes. Souvent très jeunes, elles sont d’abord rejetées par le FLN qui refuse d’accueillir des femmes parmi ses soldats. Mais bien vite, leur présence s’impose comme nécessaire : à l’inverse des hommes qui sont traqués par l’armée française, les femmes peuvent circuler librement et donc, attaquer tout aussi librement. Les fidayate, vêtues du haïk, tenue traditionnelle algérienne, pouvaient cacher sous ces vêtements amples, les armes, bombes ou encore messages qu’elles devaient transmettre. Mais il y avait également parmi les fidayate des femmes à l’allure européenne qui leur permettait, vêtues d’habits occidentaux, de s’infiltrer dans les quartiers et cafés européens et d’y poser des bombes, causant de nombreux dégâts. L’efficacité des fidayate fut notamment remarquée lors de la bataille d’Alger en 1957

 

« Si je meurs, vous ne devez pas me pleurer. » 

 

Parmi toutes les moudjahidate, le nom de certaines restent gravé dans la mémoire algérienne. Ces femmes au courage sans limite se sont battues pour leur pays, parfois jusqu’à la mort. Hassiba Ben Bouali en est l’exemple parfait. Elle est tuée au combat le 8 octobre 1957 à l’âge de 19 ans. Elle faisait partie des fidayate. Peu de temps avant sa mort, elle écrivait dans une lettre à ses parents « Si je meurs, vous ne devez pas me pleurer, je serais morte heureuse, je vous le certifie. » Malgré son jeune âge, la combattante défendit la cause qu’elle croyait juste jusqu’à sa mort. 

Zohra Drif, poseuse de bombes, considérée par le peuple algérien comme une héroïne. A plus de 80 ans, elle continue à défendre ses opinions politiques puisqu’elle avait participé aux nombreuses manifestations pour la destitution de l’ancien président algérien Bouteflika. 

Fidayate pendant la guerre d’Algérie. De gauche à droite : Samia Lakhdari, Zohra Drif, Djamila Bouhired et Hassiba Ben Bouali
Fidayate pendant la guerre d’Algérie. De gauche à droite : Samia Lakhdari, Zohra Drif, Djamila Bouhired et Hassiba Ben Bouali

Djamilah Bouhired, quant à elle, participait notamment aux recrutements des moudjahidate. Elle avait été condamnée à la peine de mort par la justice française. Heureusement, la peine ne fut pas appliquée et Djamilah est toujours en vie. 

Djamilah Boupacha, engagée dès l’âge de 15 ans et arrêtée en 1960, elle est la preuve vivante des horreurs perpétuées par l’armée française. Emprisonnée clandestinement pendant un mois, elle est torturée et violée à de multiples reprises. Condamnée à mort par l’armée française, elle est amnistiée grâce aux accords d’Evian et libérée après l’indépendance de l’Algérie. 

Enfin, Raymonde Peschard, née en Algérie, mais pied-noire, est la seule femme d’origine européenne reconnue comme martyre par l’Algérie. Elle a perdu la vie au combat à l’âge de 30 ans, froidement abattu par l’armée française. 

La guerre qu’ont menée les Algériens pour leur indépendance n’aurait pu être remportée sans l’aide précieuse de ces femmes, bien souvent inconnues du public français, au courage extraordinaire et aux convictions tranchées. Même si beaucoup on payait le prix de la liberté de leur vie, d’autres ont pu voir leur vision se réaliser. Dans les deux cas, le nom et l’histoire des moudjahidate, continuent d’inspirer le respect au peuple algérien.

Crédit photo: CC BY-SA 4.0 Alioueche Mokhtar

Besma KECHAD

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