Médaille de bronze du commerce de la mort

Le business de l’armement n’a jamais été aussi florissant, malgré le traité sur le commerce des armes de 2014. Ce traité, qui a abouti après six ans de négociations, n’a pas empêché ces signataires de l’enfreindre à maintes reprises. L’ironie, c’est qu’il stipule l’interdiction formelle de vendre des armes aux pays enfreignant les droits de l’homme et commettant des crimes de guerre.

 

Médaille de bronze

Selon le dernier rapport de l’institut international de recherche sur la paix (Sipri), la France est le troisième pays exportateur d’armes. Actuellement, le marché de l’armement français représente 7,9% des ventes totales à l’échelle mondiale. Cela peut paraître peu en comparaison aux États-Unis, leader avec 36% des ventes, et à la Russie, seconde avec 21%. Pourtant, l’hexagone a un gros potentiel dont il a su tirer profit : sur la période 2015-2019, la vente d’armes a augmenté de 72%.

 

Un marché lucratif

Bien que certains aient critiqué la mollesse politique de François Hollande – le qualifiant de “Flamby” – il faut savoir que c’est lui qui a dopé les ventes et l’exportation d’armes françaises. La France est passée de 5ème pays exportateur d’armes en 2015 à 3ème exportateur en 2018 (avec un gain de 6,9 milliards d’euros). Le gouvernement d’Emmanuel Macron a continué sur la même lancée. En effet, chaque contrat de vente nécessite l’approbation et la signature du président de la République – difficile de nier les faits.

De plus, en France, les entreprises privées d’armement (comme MBDA, spécialisée dans les missiles) embauchent beaucoup et leurs usines sont situées dans des départements où le taux de chômage est élevé. De nombreuses familles dépendent donc de ce commerce de la mort.

 

Quels usages ?

L’Asie et le Moyen-Orient sont les régions du monde où la demande d’armement est la plus importante, en raison des tensions continuelles qui les animent. La France exporte en majorité vers l’Égypte, l’Arabie Saoudite et l’Inde. La vente de rafales représente près d’un quart des exportations d’armes françaises totales. Ces ventes d’avions, de chars et d’artillerie posent moralement un problème puisqu’il a été prouvé, à plusieurs reprises, que ces outils de la mort causaient des victimes parmis les civils.

Le 15 avril 2019, le site d’informations Disclose sortait une enquête (en partenariats avec Arte, Konbini, Radio France, The Intercept et Mediapart), après avoir reçu des documents classés confidentiels. Cocorico, les dits documents démontrent l’implication de l’État français dans la guerre au Yémen : une grande partie des armes utilisées contre les civils proviennent de France.

Au Liban, la police anti-émeute a fait usage de lacrymogènes, d’un char et de lanceurs de grenade, le tout venant du pays des droits de l’Homme, pour réprimer la population. En Égypte aussi, les manifestants ont été confrontés à une police employant des armes made in France. Pourtant, un certain traité du commerce des armes interdit de vendre aux États faisant usage de ce matériel contre sa population.

 

Vendre, mais à quel prix ?

L’implication de la France dans l’utilisation d’outils de la mort fait de plus en plus débat. Patrice Bouveret, directeur de l’Observatoire des armements, avait répondu à France Info dans une interview. Sur la question de l’interdiction de vendre des armes à certains, il avait répondu : “Bien sûr qu’il y a un encadrement, que le gouvernement sait exactement quel type de matériel il vend. (…) On n’a que les montants financiers qui sont dévoilés, mais on ne sait pas quels types d’armes sont vendus. (…) il n’y a pas vraiment de débat politique au sein du Parlement et encore moins au sein la société. On met en avant les emplois qui sont créés, mais jamais l’usage qui est fait de ces armes-là”. Il ajoutait : “Pour le gouvernement français, il s’agit de maintenir son influence dans certaines zones et notamment au Moyen-Orient, parce qu’on a besoin d’acheter du pétrole. Mais il faut se poser les questions différemment et voir les dégâts sur les populations. Est-ce que le jeu en vaut la chandelle ?”. À méditer.

 

 

Jade BIHAN

 

Crédits photo : Joël Saget/AFP.

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Jade Bihan

Je suis étudiante en infocom. Mes projets : devenir journaliste reporter et voir un saiga tatarica un jour prochain.